Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) et communs numériques partagent de nombreuses similarités. Si les communs précèdent de loin la création du statut de SCIC, les deux notions font aujourd’hui l’objet d’un intérêt croissant de la part des acteurs publics, et notamment des collectivités territoriales.
Ce regain d’intérêt s’explique sans doute parce que communs numériques et SCIC sont deux instruments qui permettent à l’acteur public de satisfaire à plusieurs objectifs qui lui sont fixés :
mutualisation des moyens matériels, financiers et humains nécessaires à la réalisation des missions de service public ;
collaboration avec les acteurs privés de son territoire, démocratie participative, etc.
De ces points de convergence a émergé le constat que la SCIC pouvait constituer un outil juridique de choix au service de l’acteur public désireux de structurer un projet de commun numérique qu’il aurait initié ou rejoint.
Dans ce premier billet, nous reviendrons en détail sur la définition des deux notions ; puis évaluerons la pertinence de la SCIC comme outil juridique de structuration de projets de communs numériques.
I. Des concepts convergents qui intéressent particulièrement l’acteur public
Une étude de la définition et du régime juridique de la SCIC permet d’envisager des convergences et des synergies avec les communs numériques, notamment dans le cadre d’une mobilisation par l’acteur public.
A. Définition des communs numériques et enjeux pour les acteurs publics
Si la notion de commun numérique n’est pas précisément définie, elle renvoie aujourd’hui à l’idée d’une ou plusieurs ressources numériques produites et maintenues collectivement par une communauté d’acteurs hétérogènes, selon des règles de gouvernance auto-définies et qui en assurent le caractère démocratique et ouvert.
Aujourd’hui, les communs numériques sont de plus en plus mobilisés par les acteurs publics, et notamment les collectivités territoriales. Qu’elles en soient les initiatrices ou rejoignent des projets pré-existants, les collectivités voient dans les communs numériques des outils innovants pour renouveler les services publics et renforcer la démocratie participative ; mais également comme des moyens de mutualisation entre collectivités, voir entre acteurs publics.
B. Définition de la société coopérative d’intérêt collectif, qui introduit le multi-sociétariat au sein du mouvement coopératif français
La Société Coopérative d’Intérêt Collectif (SCIC) est une personne morale de droit privé, dont le régime est prévu par les articles 19 quinquies et suivants introduits dans la loi du 10 septembre 1947 par celle du 17 juillet 2001. La lecture de ces articles permet d’identifier plusieurs caractéristiques déterminantes des SCIC, qui permettent de les envisager comme outils de structuration de communs numériques, notamment initiés ou rejoints par l’acteur public.
Il convient d’abord de rappeler qu’il s’agit d’une coopérative, c’est-à-dire d’une « société constituée par plusieurs personnes volontairement réunies en vue de satisfaire à leurs besoins économiques ou sociaux par leur effort commun et la mise en place des moyens nécessaires », selon l’article premier de la loi de 1947. Plus précisément, les SCIC ont pour objet la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale (article 19 quinquies de la loi de 1947).
La spécificité de la SCIC réside ensuite dans le fonctionnement de son régime juridique. En effet, la loi de 2001 n’introduit pas une nouvelle forme sociale « autonome » comme c’est le cas pour les autres coopératives. La SCIC est en effet régie par la combinaison des articles 19 quinquies et suivants avec le régime juridique d’une des formes de sociétés commerciales parmi la Société Anonyme, la Société À Responsabilité Limitée et la Société par Actions Simplifiée.
Enfin, la SCIC se distingue également des autres formes coopératives en ce qu’elle prévoit le multi-sociétariat. Classiquement, les coopératives ne sont composées que des personnes bénéficiant des produits ou services qu’elles fournissent, ou de leurs salariés. À l’inverse, toute SCIC doit comprendre au moins trois catégories d’associés, parmi lesquelles figurent obligatoirement les personnes qui bénéficient de ses activités et ses salariés (ou les producteurs de biens ou de services de la coopérative). La 3e catégorie peut en outre être constituée de collectivités territoriales et de leurs groupements.
Enfin, il est à noter que la loi prévoit la transformation d’une association en SCIC avec continuation de la personne morale, à condition d’avoir mentionné la possibilité de cette transformation dans les statuts.
Pensée initialement comme une structure à mi-chemin entre l’association de loi 1901 et la société commerciale, avec comme objectif de faciliter la participation de l’acteur public à l’économie sociale et solidaire, la SCIC apparaît comme un outil particulièrement adapté à la structuration de communs numériques initiés ou rejoints par l’acteur public.
Références :
II. Points de convergence entre les deux notions
La SCIC présente ainsi de nombreux avantages dans le cadre du portage ou de la structuration d’un projet de commun numérique initié ou rejoint par l’acteur public.
A. Principes coopératifs
La SCIC s’inscrit dans le mouvement coopératif. Ce dernier, dont on situe la naissance avec la création de la Société des Équitables Pionniers de Rochdale en 1844, est régi par une série de principes. Ces derniers déjà présents dans les statuts de la Société des Équitables Pionniers de Rochdale, ont été étoffés et généralisés par l’Alliance Coopérative Internationale, au sein de la Déclaration sur l’Identité Coopérative rédigée en 1895 et révisée en 1995.
Cette déclaration liste les principes qui régissent toute coopératives, et qui sont :
L’adhésion volontaire et ouverte ;
Le contrôle démocratique exercé par les membres, ainsi que le principe démocratique « un membre, une voix » ;
La participation économique des membres ;
L’autonomie et l’indépendance ;
L’éducation, la formation et l’information des membres ;
La coopération entre les coopératives. ;
L’engagement envers la collectivité.
Ces principes font de toutes les coopératives des outils juridiques idéologiquement proches des communsnumériques et donc pertinents pour en assurer la structuration. En effet, le recours à la coopérative permet notamment de s’assurer de la préservation du caractère ouvert du commun numérique, ainsi que de la démocratie régissant sa gouvernance.
La SCIC est également un outil parfaitement adapté à la mise en place d’une gouvernance du commun numérique définie démocratiquement par sa communauté, puisqu’ une grande liberté laissée par la loi aux coopérateurs dans le cadre de la rédaction des statuts de la coopérative, permettant le développement d’une gouvernance sur-mesure. Les articles 19 quinquies et suivants laissent ainsi la faculté aux coopérateurs de prévoir ou préciser, dans les statuts, différentes dispositions (acquisition et perte de la qualité d’associé ; organisation en collège ; réserve statutaire, etc.)
En plus de ces traits partagés avec l’ensemble des coopératives, l’originalité de la SCIC parmi les coopératives, qui renforce sa pertinence dans la structuration de communs numériques initiés ou rejoints par un acteur public, réside dans deux éléments : le multi-sociétariat et son objet de production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale.
C. Multi-sociétariat
Le multi-sociétariat, nous l’avons vu, est une originalité parmi les coopératives. Dans le cadre de structuration de projets de communs numériques, le régime juridique de la SCIC, en ce qu’il organise ce multi-sociétariat, encadre et sécurise la participation de l’acteur public, et notamment des collectivités, à l’entreprise. Ainsi, la loi de 1947 prévoit la participation aux SCIC des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics territoriaux, qui peuvent en détenir ensemble jusqu’à 50 % du capital. Par ailleurs, la loi autorise également les collectivités territoriales et leurs groupements à accorder des subventions aux sociétés coopératives d’intérêt collectif en vue de participer à leur développement.
Afin de faciliter la gouvernance d’une coopérative ainsi composée d’acteurs hétérogène, la loi prévoit aussi que les coopérateurs puissent s’organiser en collèges, qui disposent chacun d’une voix à l’assemblée générale. Les statuts peuvent déroger à cette répartition des voix, sans toutefois qu’un collège ne puisse détenir plus de 50 % ou moins de 10 % du total des droits de vote.
Le régime juridique garantit donc la gouvernance du commun selon le principe démocratique et des règles définies par la communauté elle-même, tout en sécurisant la participation de l’acteur public.
D. Intérêt général et utilité sociale
Toutes les SCIC doivent avoir pour objet la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale.
L’activité d’utilité sociale est définie par une instruction fiscale du 15 septembre 1998 comme « l’activité qui tend à satisfaire un besoin qui n’est pas pris en compte par le marché, ou qui l’est de façon peu satisfaisante faute d’être rentable », rejoignant ainsi l’une des principales motivations au développement d’un commun numérique, notamment de la part d’acteurs publics.
Concernant l’intérêt collectif, il ne connaît pas de définition précise mais est mobilisé par différentes branches du droit, et notamment le droit des sociétés, où il est distinct de l’intérêt social. Tandis que l’intérêt social désigne l’intérêt de la société personne morale, tandis que l’intérêt collectif désigne celui de ses membres. Or, dans le cadre d’un commun numérique, la motivation première des membres à rejoindre la communauté structurée autour de la ressource est l’intérêt qu’ils ont au développement de celle-ci. Ainsi, parce que la SCIC doit avoir pour objet la satisfaction de l’intérêt collectif de ses membres, la SCIC est particulièrement pertinente pour structurer des projets de communs numériques.
E. Conciliation d’une activité économique facilitée et de la poursuite d’un but non-lucratif
Le dernier avantage de la SCIC est de combiner la poursuite d’un but non-lucratif, ou du moins a-capitaliste, avec la possibilité de développer une activité économique conséquente.
Toute SCIC est en effet basée sur une société commerciale classique – SA, SARL ou SAS – ce qui a deux avantages. D’une part, cela l’inscrit dans le droit commercial et lève les limitations aux développements de l’activité commerciale à laquelle sont contraintes les autres coopératives, et plus généralement les structures de l’économie sociale et solidaire. D’autre part, le recours à des formes sociales et régimes juridiques connus des opérateurs économies viendra rassurer les partenaires économiques.
Cependant, cette inscription dans le paysage économique « classique » se fait dans un cadre qui assure une compatibilité à la fois avec l’économie sociale et solidaire et les communs numériques. Ainsi, on l’a vu, l’objet de toute SCIC est la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale. Par ailleurs, la SCIC peut être vu comme à but non-lucratif, ou du moins a-capitaliste, du fait de l’importance des réserves devant être constituées. Le régime légal de la SCIC prévoit ainsi la constitution d’une réserve statutaire en plus de la réserve légale, conduisant à la mise en réserve de plus de 50 % des bénéfices réalisés par la société. D’autre part, la rémunération des parts sociales est fortement limitée (article 19 nonies).
Ainsi, Toutes les SCIC doivent avoir pour objet la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale.
La SCIC constitue ainsi théoriquement un outil parfait pour structurer des communs numériques initiés ou rejoints par l’acteur public. Cependant, la mise en œuvre pratique d’une telle structure à cette fin peut rencontrer quelques irritants, sur lesquels nous reviendrons et tenterons d’apporter des solutions dans un prochain billet.
Toutes les SCIC doivent avoir pour objet la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale.
Quelles structures juridiques pour porter des communs numériques ?
#1 - Eclairage théorique : la Société Coopérative d'Intérêt Collectif (SCIC) comme structure juridique pour les communs numériques ?
Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) et communs numériques partagent de nombreuses similarités. Si les communs précèdent de loin la création du statut de SCIC, les deux notions font aujourd’hui l’objet d’un intérêt croissant de la part des acteurs publics, et notamment des collectivités territoriales.
Ce regain d’intérêt s’explique sans doute parce que communs numériques et SCIC sont deux instruments qui permettent à l’acteur public de satisfaire à plusieurs objectifs qui lui sont fixés :
mutualisation des moyens matériels, financiers et humains nécessaires à la réalisation des missions de service public ;
collaboration avec les acteurs privés de son territoire, démocratie participative, etc.
De ces points de convergence a émergé le constat que la SCIC pouvait constituer un outil juridique de choix au service de l’acteur public désireux de structurer un projet de commun numérique qu’il aurait initié ou rejoint.
Dans ce premier billet, nous reviendrons en détail sur la définition des deux notions ; puis évaluerons la pertinence de la SCIC comme outil juridique de structuration de projets de communs numériques.
I. Des concepts convergents qui intéressent particulièrement l’acteur public
Une étude de la définition et du régime juridique de la SCIC permet d’envisager des convergences et des synergies avec les communs numériques, notamment dans le cadre d’une mobilisation par l’acteur public.
A. Définition des communs numériques et enjeux pour les acteurs publics
Si la notion de commun numérique n’est pas précisément définie, elle renvoie aujourd’hui à l’idée d’une ou plusieurs ressources numériques produites et maintenues collectivement par une communauté d’acteurs hétérogènes, selon des règles de gouvernance auto-définies et qui en assurent le caractère démocratique et ouvert.
Aujourd’hui, les communs numériques sont de plus en plus mobilisés par les acteurs publics, et notamment les collectivités territoriales. Qu’elles en soient les initiatrices ou rejoignent des projets pré-existants, les collectivités voient dans les communs numériques des outils innovants pour renouveler les services publics et renforcer la démocratie participative ; mais également comme des moyens de mutualisation entre collectivités, voir entre acteurs publics.
B. Définition de la société coopérative d’intérêt collectif, qui introduit le multi-sociétariat au sein du mouvement coopératif français
La Société Coopérative d’Intérêt Collectif (SCIC) est une personne morale de droit privé, dont le régime est prévu par les articles 19 quinquies et suivants introduits dans la loi du 10 septembre 1947 par celle du 17 juillet 2001. La lecture de ces articles permet d’identifier plusieurs caractéristiques déterminantes des SCIC, qui permettent de les envisager comme outils de structuration de communs numériques, notamment initiés ou rejoints par l’acteur public.
Il convient d’abord de rappeler qu’il s’agit d’une coopérative, c’est-à-dire d’une « société constituée par plusieurs personnes volontairement réunies en vue de satisfaire à leurs besoins économiques ou sociaux par leur effort commun et la mise en place des moyens nécessaires », selon l’article premier de la loi de 1947. Plus précisément, les SCIC ont pour objet la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale (article 19 quinquies de la loi de 1947).
La spécificité de la SCIC réside ensuite dans le fonctionnement de son régime juridique. En effet, la loi de 2001 n’introduit pas une nouvelle forme sociale « autonome » comme c’est le cas pour les autres coopératives. La SCIC est en effet régie par la combinaison des articles 19 quinquies et suivants avec le régime juridique d’une des formes de sociétés commerciales parmi la Société Anonyme, la Société À Responsabilité Limitée et la Société par Actions Simplifiée.
Enfin, la SCIC se distingue également des autres formes coopératives en ce qu’elle prévoit le multi-sociétariat. Classiquement, les coopératives ne sont composées que des personnes bénéficiant des produits ou services qu’elles fournissent, ou de leurs salariés. À l’inverse, toute SCIC doit comprendre au moins trois catégories d’associés, parmi lesquelles figurent obligatoirement les personnes qui bénéficient de ses activités et ses salariés (ou les producteurs de biens ou de services de la coopérative). La 3e catégorie peut en outre être constituée de collectivités territoriales et de leurs groupements.
Enfin, il est à noter que la loi prévoit la transformation d’une association en SCIC avec continuation de la personne morale, à condition d’avoir mentionné la possibilité de cette transformation dans les statuts.
Pensée initialement comme une structure à mi-chemin entre l’association de loi 1901 et la société commerciale, avec comme objectif de faciliter la participation de l’acteur public à l’économie sociale et solidaire, la SCIC apparaît comme un outil particulièrement adapté à la structuration de communs numériques initiés ou rejoints par l’acteur public.
Références :
II. Points de convergence entre les deux notions
La SCIC présente ainsi de nombreux avantages dans le cadre du portage ou de la structuration d’un projet de commun numérique initié ou rejoint par l’acteur public.
A. Principes coopératifs
La SCIC s’inscrit dans le mouvement coopératif. Ce dernier, dont on situe la naissance avec la création de la Société des Équitables Pionniers de Rochdale en 1844, est régi par une série de principes. Ces derniers déjà présents dans les statuts de la Société des Équitables Pionniers de Rochdale, ont été étoffés et généralisés par l’Alliance Coopérative Internationale, au sein de la Déclaration sur l’Identité Coopérative rédigée en 1895 et révisée en 1995.
Cette déclaration liste les principes qui régissent toute coopératives, et qui sont :
L’adhésion volontaire et ouverte ;
Le contrôle démocratique exercé par les membres, ainsi que le principe démocratique « un membre, une voix » ;
La participation économique des membres ;
L’autonomie et l’indépendance ;
L’éducation, la formation et l’information des membres ;
La coopération entre les coopératives. ;
L’engagement envers la collectivité.
Ces principes font de toutes les coopératives des outils juridiques idéologiquement proches des communsnumériques et donc pertinents pour en assurer la structuration. En effet, le recours à la coopérative permet notamment de s’assurer de la préservation du caractère ouvert du commun numérique, ainsi que de la démocratie régissant sa gouvernance.
La SCIC est également un outil parfaitement adapté à la mise en place d’une gouvernance du commun numérique définie démocratiquement par sa communauté, puisqu’ une grande liberté laissée par la loi aux coopérateurs dans le cadre de la rédaction des statuts de la coopérative, permettant le développement d’une gouvernance sur-mesure. Les articles 19 quinquies et suivants laissent ainsi la faculté aux coopérateurs de prévoir ou préciser, dans les statuts, différentes dispositions (acquisition et perte de la qualité d’associé ; organisation en collège ; réserve statutaire, etc.)
En plus de ces traits partagés avec l’ensemble des coopératives, l’originalité de la SCIC parmi les coopératives, qui renforce sa pertinence dans la structuration de communs numériques initiés ou rejoints par un acteur public, réside dans deux éléments : le multi-sociétariat et son objet de production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale.
C. Multi-sociétariat
Le multi-sociétariat, nous l’avons vu, est une originalité parmi les coopératives. Dans le cadre de structuration de projets de communs numériques, le régime juridique de la SCIC, en ce qu’il organise ce multi-sociétariat, encadre et sécurise la participation de l’acteur public, et notamment des collectivités, à l’entreprise. Ainsi, la loi de 1947 prévoit la participation aux SCIC des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics territoriaux, qui peuvent en détenir ensemble jusqu’à 50 % du capital. Par ailleurs, la loi autorise également les collectivités territoriales et leurs groupements à accorder des subventions aux sociétés coopératives d’intérêt collectif en vue de participer à leur développement.
Afin de faciliter la gouvernance d’une coopérative ainsi composée d’acteurs hétérogène, la loi prévoit aussi que les coopérateurs puissent s’organiser en collèges, qui disposent chacun d’une voix à l’assemblée générale. Les statuts peuvent déroger à cette répartition des voix, sans toutefois qu’un collège ne puisse détenir plus de 50 % ou moins de 10 % du total des droits de vote.
Le régime juridique garantit donc la gouvernance du commun selon le principe démocratique et des règles définies par la communauté elle-même, tout en sécurisant la participation de l’acteur public.
D. Intérêt général et utilité sociale
Toutes les SCIC doivent avoir pour objet la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale.
L’activité d’utilité sociale est définie par une instruction fiscale du 15 septembre 1998 comme « l’activité qui tend à satisfaire un besoin qui n’est pas pris en compte par le marché, ou qui l’est de façon peu satisfaisante faute d’être rentable », rejoignant ainsi l’une des principales motivations au développement d’un commun numérique, notamment de la part d’acteurs publics.
Concernant l’intérêt collectif, il ne connaît pas de définition précise mais est mobilisé par différentes branches du droit, et notamment le droit des sociétés, où il est distinct de l’intérêt social. Tandis que l’intérêt social désigne l’intérêt de la société personne morale, tandis que l’intérêt collectif désigne celui de ses membres. Or, dans le cadre d’un commun numérique, la motivation première des membres à rejoindre la communauté structurée autour de la ressource est l’intérêt qu’ils ont au développement de celle-ci. Ainsi, parce que la SCIC doit avoir pour objet la satisfaction de l’intérêt collectif de ses membres, la SCIC est particulièrement pertinente pour structurer des projets de communs numériques.
E. Conciliation d’une activité économique facilitée et de la poursuite d’un but non-lucratif
Le dernier avantage de la SCIC est de combiner la poursuite d’un but non-lucratif, ou du moins a-capitaliste, avec la possibilité de développer une activité économique conséquente.
Toute SCIC est en effet basée sur une société commerciale classique – SA, SARL ou SAS – ce qui a deux avantages. D’une part, cela l’inscrit dans le droit commercial et lève les limitations aux développements de l’activité commerciale à laquelle sont contraintes les autres coopératives, et plus généralement les structures de l’économie sociale et solidaire. D’autre part, le recours à des formes sociales et régimes juridiques connus des opérateurs économies viendra rassurer les partenaires économiques.
Cependant, cette inscription dans le paysage économique « classique » se fait dans un cadre qui assure une compatibilité à la fois avec l’économie sociale et solidaire et les communs numériques. Ainsi, on l’a vu, l’objet de toute SCIC est la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale. Par ailleurs, la SCIC peut être vu comme à but non-lucratif, ou du moins a-capitaliste, du fait de l’importance des réserves devant être constituées. Le régime légal de la SCIC prévoit ainsi la constitution d’une réserve statutaire en plus de la réserve légale, conduisant à la mise en réserve de plus de 50 % des bénéfices réalisés par la société. D’autre part, la rémunération des parts sociales est fortement limitée (article 19 nonies).
Ainsi, Toutes les SCIC doivent avoir pour objet la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale.
La SCIC constitue ainsi théoriquement un outil parfait pour structurer des communs numériques initiés ou rejoints par l’acteur public. Cependant, la mise en œuvre pratique d’une telle structure à cette fin peut rencontrer quelques irritants, sur lesquels nous reviendrons et tenterons d’apporter des solutions dans un prochain billet.
Toutes les SCIC doivent avoir pour objet la production ou la fourniture de biens et de services d’intérêt collectif, qui présentent un caractère d’utilité sociale.