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Édition 2022 du carnet Labo Société Numérique
Depuis janvier 2022, de nouvelles productions ont fait leur apparition pour étoffer la diversité des formats déjà proposés sur le site du Labo Société Numérique. Articles, dossiers, notes stratégiques, rapports, ce sont au moins trois publications par semaine que le Labo met à votre disposition pour documenter le développement du numérique d'intérêt général dans notre pays.Le dispositif Labo Société Numérique est au cœur de nos actions : il s’inscrit dans notre conviction que les politiques publiques se construisent dans le dialogue avec les sciences humaines et sociales, se pilotent par les données et nécessitent des espace de réflexivité comme celui-ci.Cet outil de travail, nous souhaitons le rendre disponible pour le plus grand nombre : élu.e.s, agents publics, chercheur.euse.s, professionnel.le.s du numérique ; ces contenus sont à votre disposition.Bonne lecture !

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LexImpact : comment un logiciel de simulation ouvert permet de mesurer l’impact d'un projet de loi ?
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Géocommuns : le Sénat appelle à un renforcement des liens entre l'IGN et les collectivités locales
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Voir tous les articlesHumains & Machines : le CNNUM appelle à mettre les outils numériques au service des travailleur.euse.s
Dans un dossier intitulé « Humains & Machines. Quelles interactions au travail ? », le Conseil national du numérique appelle à mettre les outils numériques au service des travailleur.euse.s. Il identifie 10 leviers pour rendre les travailleur.euse.s acteur.rice.s de leur relation au numérique.Le rapport s'intéresse en premier lieu à la façon dont les interactions se nouent entre humains et le rôle que le corps et le langage non verbal y jouent, avant de prolonger cet examen aux interactions entre humains et machines.
Des travailleur.euse.s subalternes aux managersCes observations sont confrontées aux vécus des travailleur.euse.s, en commençant par les travailleur.euse.s subalternes. Dans l’industrie, certains robots industriels ou exosquelettes ont permis d’améliorer les conditions de travail en effectuant à la place des travailleur.eue.s des tâches dangereuses.Les questions qui ont émergé à la faveur de la révolution industrielle restent, toutefois, entièrement d’actualité : la perte d’autonomie, la négation des savoir-faire, le renforcement des dispositifs de contrôle et de surveillance…Plus nouveau, on assiste à une extension de certains dispositifs à d’autres catégories de travailleur.euse.s subalternes, dans le domaine des services par exemple avec un renforcement du minutage des tâches à effectuer qui est souvent vécu comme allant contre les qualités d’empathie émotionnelle et le fondement interactionnel de beaucoup de ces métiers.Les travailleur.euse.s intermédiaires et les cadres avaient été relativement préservé.e.s des révolutions industrielles jusqu’alors. Mais la révolution numérique a fait entrer la machine dans les bureaux : e-mails, téléphones professionnels, messageries d’entreprise, visioconférences, outils de surveillance.Les outils numériques sont désormais omniprésents et mettent à l’épreuve les corps et les façons de travailler de ces catégories socio-professionnelles, avec un impact particulièrement important sur les managers de proximité.Malgré les effets positifs des outils numériques pour l’efficacité, la transparence, l’autonomie au travail, les outils peuvent être perçus comme des concurrents et comme les synonymes d’une perte de responsabilité pour ces managers.Anticiper les effets« Alors qu’il existe souvent un décalage important entre les intentions présidant à la conception des outils et leurs usages effectifs, observent Justine Cassell, Olga Kokshagina, Dominique Pasquier et Éric Salobir, membres du Conseil national du numérique, il est nécessaire d’anticiper leurs effets avec des dispositifs pour :Impliquer les travailleurs concernés le plus en amont possible dans la conception et le déploiement de leurs outils ;Former l’ensemble des parties prenantes (travailleurs, managers, partenaires sociaux, médecins du travail…) à leur usage ;Réaliser une étude d’impact préalable à leur déploiement, intégrant notamment leurs effets potentiels sur le travail mais également sur les interactions au sein des équipes et les dynamiques collectives. »Il s’agit ensuite, observent les auteur.rice.s du rapport, « d'encourager à l'accompagnement des collaborateurs grâce à un processus continu d’évaluation, d’amélioration des échanges autour de ces outils et des modes de travail qu’ils engendrent pour :Mettre en place un dispositif de remontée continue d’informations sur la façon dont les travailleurs vivent leur relation aux outils numériques ;Accompagner le déploiement d’un travail hybride, entre télétravail et travail en présentiel, qui ne soit pas subi mais source d’opportunités et d’accroissement de la qualité de vie au travail et dans la vie personnelle ;Assurer l’effectivité d’un dialogue social ouvert à plusieurs niveaux, régulier et transparent incluant l’ensemble des parties prenantes concernées par les outils numériques ;Faire du numérique au travail un pilier de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises. »Rendre la régulation sur les outils numériques de travail efficace et effective« Si les droits et libertés numériques jouissent d’un cadre légal et réglementaire riche et en construction, leurs applications dans le contexte du travail doivent être consolidées, notamment en matière de surveillance numérique au travail ». Il s’agirait de :Rendre la régulation sur les outils numériques de travail efficace et effective, en clarifiant les dispositions préexistantes en matière de droits et libertés numériques applicables dans un contexte de travail, en les renforçant et en assurant que ceux qui utilisent les outils soient impliqués dans la conception et la mise en œuvre de la régulation ;Accroître la vigilance et l’effectivité des droits des travailleur.euse.s en matière de surveillance au travail. Il est indispensable de renforcer l’information des travailleur.euse.s quant à leurs droits et aux voies de recours qui se présentent à eux en cas de manquement. Cette formation doit aussi viser les représentant.e.s des travailleur.euse.s pour assurer au mieux leur mission de vigie et de conseil ;Encourager et approfondir la recherche sur les outils numériques de travail et leurs apports et impacts sur les travailleur.euse.s.Ce dossier est issu de débats organisés au sein du Conseil national du numérique, de la rencontre avec des acteur.rice.s et d’une revue de la littérature scientifique existante. « Loin de prétendre offrir une vue conclusive sur ce sujet, ces travaux visent à encourager la production d'autres travaux, de réflexions et surtout à échanger sur ce sujet. »

LexImpact : comment un logiciel de simulation ouvert permet de mesurer l’impact d'un projet de loi ?
L’Assemblée nationale met, depuis 2020, à la disposition des députés un service, LexImpact, qui permet aux députés de simuler les effets d’un amendement sur le barème de l’impôt sur le revenu, sur la dotation aux collectivités, sur certaines cotisations sociales et d’en vérifier l’impact sur des cas types comme sur les finances publiques et leur effet sur la redistribution des revenus.Ce service s’appuie sur un logiciel de simulation, LexImpact, qui repose sur le moteur de calcul OpenFisca, un moteur de calcul libre et ouvert créé en 2011, qui permet de modéliser le système socio-fiscal de manière collaborative et transparente.Le code de LexImpact est libre, sous licence AGPL-3.0.Les services proposés aux députésun simulateur de l'impôt sur le revenuun simulateur sur les dotations aux communesun simulateur sur les cotisations & prestations sociales (en développement)un tableau de bord des données par circonscription (en développement)un formulaire permettant de faire une demande de chiffrage spécifique (ce service s'adresse uniquement aux personnes rattachées à l'Assemblée nationale : député, collaborateur, administrateur)Des simulateurs à la disposition de la société civileL’Assemblée Nationale met en accès libre certains des simulateurs LexImpact pour simuler les impacts d'une réforme sur des cas types.« Ces estimations permettent d'évaluer l'impact d'une modification de la loi sur une entité fictive. Elles ne s'appuient pas sur des données représentatives de la populations française. Concernant le simulateur des dotations aux communes, les données représentatives de la population française étant ouvertes, le simulateur est entièrement en accès libre et permet donc, à toutes et tous, de simuler les impacts macros d'une réforme sur la population et les recettes de l'État ».L'utilisation de cette partie du service est libre et gratuite.Le service LexImpact est rattaché à la Direction du Contrôle et de l'évaluation, spécialisé dans le chiffrage et la gestion de données. L'équipe agrège plusieurs types de compétences (science des données, développement et design) permettant de récupérer des données, de les analyser, et de les rendre accessibles par des interfaces adaptées.

Géocommuns : le Sénat appelle à un renforcement des liens entre l'IGN et les collectivités locales
Depuis la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi Notre », les régions ont vu leurs compétences renforcées en matière d’information géographique. Chaque région a désormais la responsabilité d’assurer « la coordination, au moyen d’une plateforme de services numériques qu’elle anime, de l’acquisition et de la mise à jour des données géographiques de référence nécessaires à la description détaillée de son territoire ainsi qu’à l’observation et à l’évaluation de ses politiques territoriales, données dont elle favorise l’accès et la réutilisation », observe un rapport sénatorial consacré à l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN).Les régions sont devenues de véritables pilotes stratégiques de la politique d’information géographique. Parallèlement à la montée en puissance des régions, les grandes métropoles consacrent aussi de plus en plus de moyens à l’information géolocalisée. Certaines métropoles pionnières telles que Nice, Bordeaux, Lyon, Rennes ou encore Strasbourg affichent des ambitions particulièrement fortes dans ce domaine.Les « Géocommuns » et le programme Géoplateforme au cœur du repositionnement de l’IGN.L’IGN a entrepris, en 2019, de se transformer et de refonder son modèle. « D’une mission de production-diffusion d’information géographique, l’IGN évolue vers des rôles d’agrégateur de données, d’expert, de coordinateur ou de certificateur. Il recentre son action sur la production des données socles souverains ainsi que sur le pilotage de vastes projets d’accompagnement de grandes politiques publiques directement financés par leurs commanditaires ».Le concept de « Géocommuns » et le programme de géoplateforme sont ainsi au cœur du repositionnement de l’IGN. Destinée à prendre le relai de l’actuel géoportail, la géoplateforme doit constituer une infrastructure mutualisée pour la gestion et la diffusion de l’information géographique.« Beaucoup de chemin reste encore à parcourir », observe toutefois le sénateur Vincent Capo-Canellas qui note, qu’en plus de ses moyens propres, pour mettre à jour différentes couches du référentiel à grande échelle (RGE), l’IGN agrège désormais des données collectées par des partenaires, principalement issus de la sphère publique. « Un espace collaboratif qui préfigure la géoplateforme permet notamment à l’IGN de recueillir des données collectées par les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), les géomètres-experts, des collectivités locales ou des parcs naturels ».Après avoir esquissé la perspective d’un cadastre unique entre les impôts et l’IGN, passé en revue le projet de représentation parcellaire cadastrale unique (RPCU) et le Plan de corps de rue simplifié (PCRS), le sénateur Vincent Capo-Canellas appelle à « renforcer et formaliser les collaborations de l’IGN avec le secteur local » et souligne, en conclusion, « l’importance pour la France de disposer d’un établissement géographique souverain de référence tel que l’IGN pour appuyer les politiques de prévention ».

Le vote par Internet, une solution pour faire reculer l’abstention ?
Le vote en ligne, vote numérique ou vote par Internet, est un dispositif permettant de participer à l’acte électoral par Internet et sans forcément se rendre dans un bureau de vote. Il se distingue du vote électronique qui englobe aussi les machines à voter installées dans des bureaux de vote. S’il n’a jamais été utilisé lors d'élections présidentielles en France, le vote en ligne est cependant déjà présent dans notre pays, pour les élections intra-partisanes (primaires), pour les élections professionnelles, ou encore pour le vote des Français.es de l’étranger lors des dernières élections législatives et consulaires.Le vote en ligne est souvent évoqué ces dernières années comme une solution pour lutter contre la hausse de l’abstention.Dans le cadre du programme de recherche ESPOL-Lab, quatre chercheur.euse.s, Marie Neihouser (Université de Toulouse), Felix-Christopher von Nostitz et Giulia Sandri (Institut catholique de Lille) et Tristan Haute (Université de Lille) ont interrogé un échantillon représentatif de la population française inscrite sur les listes électorales lors de l’élection présidentielle 2022 à propos du vote en ligne.60 % des interrogé.e.s se déclarent tout à fait ou plutôt d’accord avec la possibilité de mettre en place un tel mécanisme en France à l’occasion des élections.Seuls 30,7 % sont en désaccord.Les mêmes proportions de citoyen.ne.s déclarent qu’ils utiliseraient (60,4 %) ou non (30,9 %) ce mécanisme s’il était disponible pour voter à l’élection présidentielle, les réponses aux deux questions étant très corrélées.
Confirmant largement les résultats déjà obtenus dans les travaux menés à l’étranger, observent les auteur.ice.s de l’étude « trois facteurs semblent particulièrement prégnants dans la propension à envisager ou non recourir au vote en ligne s’il est disponible : l’habitude, la sécurité du dispositif et les caractéristiques des individus ».Celles et ceux qui sont plus habitué.e.s à utiliser Internet dans leur vie quotidienne ou pour des démarches administratives sont plus enclins à être favorables au vote en ligne quand celles et ceux qui n’y sont pas favorables mettent en avant le fait qu’ils/elles n’aient jamais utilisé Internet pour voter.La sécurité est toutefois le principal argument de celles et ceux qui n’envisagent pas de voter en ligne. « La confiance (dans le système politique, dans les infrastructures techniques ou dans l’organisation du scrutin plus que dans ses propres compétences informatiques) reste de première importance en matière d’adoption du vote en ligne. Et force est de constater que sur ce point, des progrès sont encore à réaliser ».En fonction de leur niveau d’étude ou de leur niveau d’intérêt pour la politique, les individus semblent proportionnellement plus ou moins enclins à adopter ou non le vote en ligne.« Non seulement les progrès en termes de participation dans les pays ayant déjà implémenté le vote en ligne sont assez marginaux », concluent les auteur.ice.s, « mais le vote en ligne ne semble pas en mesure de réduire les inégalités sociales de participation électorale qui font craindre à de nombreux chercheurs qu’une majorité sociale ne devienne une minorité électorale ».
Comment lutter contre l’abstention ?Dans la Vie des Idées, Jean Beuve (Université Paris 1 Panthéon Sorbonne), Étienne Fize (Conseil d’Analyse Économique) et Vincent Pons (Harvard) passent en revue les raisons de l’abstention et proposent un certain nombre de mesures pour inciter les citoyens à reprendre le chemin des bureaux de vote :« À court terme, la participation pourrait être stimulée par une réduction du coût du vote. Des simplifications récentes des procédures d’inscription sur les listes électorales et de demande de procuration ont permis de lever certains obstacles. Ces réformes restent trop lentes et timorées. Il faut désormais se tourner vers des remèdes autrement plus puissants. Nous en avons identifié deux : rendre l’inscription sur les listes électorales automatique pour tous et simplifier le calendrier électoral en alignant notamment les dates des prochaines élections présidentielles et législatives.À plus long terme, il faudra s’attaquer aux racines collectives du mal comme la sensation que les élus sont impuissants face aux difficultés économiques rencontrées par de nombreux Français et le sens émoussé du devoir civique. Pour former les futurs citoyens, la refonte de l’éducation civique est une piste à envisager avec sérieux, même si elle ne porterait ses fruits que d’ici plusieurs années. Pour renouer le lien avec les moins jeunes qui se sont éloignés des urnes, l’État devra considérer des interventions dont il n’a pas l’habitude, mais que d’autres pays ont mises en place avec succès, y compris des campagnes de terrain ambitieuses ».

Les Français.es et la fatigue informationnelle : enquête sur les mutations et tensions dans notre rapport à l’information
Surcharge informationnelle, infobésité, syndrome de saturation cognitive… L'Observatoire Société et Consommation (L'ObSoCo), Arte et la Fondation Jean-Jaurès ont mené une enquête pour comprendre les effets que produisent sur les individus la multiplication des canaux d’information, leur profusion et leur transformation dans la façon de les produire. Ils ont soumis un échantillon de Français.es à un questionnement détaillé destiné à saisir à la fois leur difficulté à trier l’information et leur degré ressenti de stress et de fatigue face à son flux.De profonds bouleversements des pratiques informationnellesPour une majorité de Français.es, il est important de s’informer régulièrement dans les médias (59%). Pour un Français sur cinq, c’est même « très » important (20%). Pour autant, les façons de le faire ont considérablement changé en une poignée d’années.Aujourd’hui, pour s’informer, ils utilisent en effet en moyenne 8,3 canaux différents et 3,2 quotidiennement. Trois canaux dominent : le journal télévisé de 13 heures ou 20 heures (89% s’informent en général par son intermédiaire), les réseaux sociaux (83%) et la radio (82%). Auxquels il convient d’ajouter les usages non négligeables de formats parmi les plus récents que sont par exemple les podcasts, médias indépendants ou alternatifs.Au total et si l’on agrège l’importance qui lui est accordée, l’intensité de la consultation des médias, mais aussi les pratiques actives, 29% des Français témoignent d’un engagement fort dans la consommation d’informations, 49% d’un engagement moyen, 22% d’un engagement faible.35% des Français.es admettent devoir faire des efforts pour s’informer correctementDans ce contexte de fragmentation et multiplication des usages, 35% des Français.es admettent devoir faire des efforts pour s’informer correctement, dont un sur dix « beaucoup » d’efforts. Une difficulté davantage éprouvée par les plus jeunes (48%) et ceux qui tiennent à s’informer régulièrement (49%).53% des Français.e.s souffriraient de « fatigue informationnelle »De l’agrégation statistique des réponses à cette enquête, il ressort que 53% des Français.es disent souffrir de fatigue informationnelle, dont 38% – plus d’un tiers donc ! – en souffrent « beaucoup ». À l’inverse, 19% déclarent être « peu » et 28% « pas du tout fatigués ».En moyenne, rien ne semble fondamentalement distinguer les plus fatigué.e.s du reste de la population. Leurs usages apparaissent sensiblement similaires aux autres. Ils/elles consultent à peine plus de médias (8,6 pour 8,3 au total), sont légèrement plus habitué.e.s aux réseaux sociaux (65% pour 61% de l’ensemble) et aux médias numériques en général.Les plus fatigué.e.s sont, en revanche, plus actifs dans leur rapport à l’information : 48% la partagent (pour 40% de l’ensemble), 34% la commentent en ligne (pour 29%), 9% envoient des courriers aux animateurs ou appellent des émissions de radio (6%).Cinq profilsUne analyse statistique complémentaire permet de dégager cinq profils. Ceux-ci se distinguent à la fois par leur engagement dans la consommation d’information et par le degré de fatigue informationnelle qu’ils disent éprouver.Les « hyperconnectés épuisés » (17% de la population): « Ce profil regroupe surtout des jeunes, urbains et diplômés ayant une forte consommation médiatique, notamment via internet et les réseaux sociaux où ils sont relativement actifs. Ils se démarquent aussi par des pratiques très intenses, voire compulsives vis-à-vis de l’information et sont fortement touchés par la fatigue informationnelle. »Les « défiants oppressés » (35% de la population) : « Ce profil est plutôt féminin avec un niveau de vie modeste et un engagement moyen dans l’information, mais avec le sentiment de la subir, d’avoir du mal à se faire une opinion, de se sentir dépassé par l’information. Très affectées par cette situation, les personnes de ce groupe sont souvent en recherche d’alternatives (fact-checking). Elles ressentent une fatigue informationnelle intense et se distinguent aussi par une défiance très forte vis-à-vis des médias ».Les « hyperinformés en contrôle » (11% de la population): « Plus âgé, plutôt masculin, ce profil rassemble des personnes souvent retraitées et aisées ayant une pratique informationnelle intense, notamment de médias traditionnels, très en contrôle et non exposées à la fatigue ».Les « défiants distants » (18% de la population): « Ce profil est plutôt masculin, davantage issu de catégories modestes et a un engagement assez moyen dans les pratiques d’information. Les individus qui en sont issus expriment une forte défiance vis-à-vis des médias comme du politique, mais une assez forte confiance en eux-mêmes. Ils sont très négatifs sur la situation collective (le monde, la société, la démocratie), ont un fort sentiment d’impuissance et l’impression de subir, de ne pas avoir la liberté et le contrôle sur leur avenir ».Les ne sait pas/non concernés (20% de la population) : « Habitants du périurbain et des communes peu denses, ce sont des actifs occupés d’âge intermédiaire avec enfants. Ils consomment peu d’informations. Ils ne sont ni engagés dans la recherche d’information, ni impactés par une forme de fatigue à cet égard. Ils mènent leur vie et en sont relativement satisfaits. Ils ne sont pas du tout intéressés par la politique, ne se sentent pas représentés sans être pour autant défiants ».Entre stratégies de protection...Face au flux d’information, des stratégies de protection commencent à se mettre en place sur le plan individuel. Ainsi, 53% des Français.es disent qu’il/elle leur arrive de désactiver les notifications de leur téléphone portable, dont plus d’un quart (27%) régulièrement. En outre, 30% se forcent parfois à ne pas allumer la télévision, 27% surveillent leur temps d’écran. Autre façon de reprendre le contrôle : 12% déclarent consulter des sites de fact-checking. Chacune de ces stratégies est d’ailleurs davantage pratiquée par les plus fatigué.e.s.…et risque de retraitPlus impressionnant, car plus radical et plus massif : 77% de Français.es déclarent qu’il/elle leur arrive de limiter ou de cesser de consulter les informations, dont 28% régulièrement. Et c’est le cas de 90% des plus fatigué.e.s.Ce retrait est motivé avant tout par des débats qu’ils/elles jugent trop polémiques et agressifs (34%), le manque de fiabilité des informations (32%) et l’impact négatif sur leur humeur ou leur moral (31%). Le manque d’intérêt n’intervient qu’ensuite (25%), de même que le temps que cela prend (14%). « Il est intéressant aussi de constater que, pour 16% de ceux qui lâchent, le fait que les médias ne rendent pas compte de ce qu’ils vivent et de leurs opinions joue un rôle ».Un enjeu démocratiqueCette fatigue informationnelle, à laquelle un.e Français.e sur deux est exposé.e, « contribue, à étouffer les processus critiques et intellectuels. Elle peut aussi engendrer des processus de recherche à tout prix d’informations alternatives, mais aussi et surtout la sensation de ne plus rien comprendre à rien, ainsi que le risque de tout bonnement renoncer à s’informer ». En ce sens, cette fatigue informationnelle résulte mais contribue aussi à nourrir la fatigue démocratique des Français.es, analysée dans de nombreuses études.

Le Mobiliscope : un outil libre de géovisualisation du rythme quotidien des territoires
Les individus ne sont pas immobiles et leurs déplacements quotidiens modifient la géographie des territoires.Le Mobiloscope est un outil de géovisualisation qui donne à voir les variations de la population présente dans les territoires au cours des 24 heures d’une journée typique de semaine. Il propose des cartes et des graphiques interactifs pour explorer heure par heure l’attractivité des territoires selon le profil démographique et social des populations présentes, leurs activités et leurs modes de transport.
Il permet notamment, expliquent Julie Vallée (CNRS), Aurélie Douet (CNRS), Guillaume Le Roux (INED) et Hadrien Commenges (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) dans un article publié dans The Conversation, « de savoir si la mobilité quotidienne des individus conduit les groupes sociaux à se mélanger durant la journée ou si, au contraire, la ségrégation sociale augmente le jour par rapport à la nuit ».Conçu et développé depuis 2017 au sein du laboratoire Géographie-cités avec le soutien de différents partenaires (principalement le CNRS, l’ANCT, l’Ined et le Cerema), cet outil d’abord centré sur l’Île-de-France, s’est progressivement enrichi de nouvelles villes.La dernière version mise en ligne en avril 2022 regroupe 49 villes-régions françaises (10 000 communes), six canadiennes et trois latino-américaines.Les données sont issues de grandes enquêtes publiques sur les déplacements quotidiens produites entre 2009 pour les plus anciennes et 2019 pour les plus récentes.Ces données sont transformées par l’équipe du Mobiliscope pour dénombrer et qualifier les populations présentes (âgées de 16 ans et plus) dans les différents territoires à chaque heure de la journée.L’interface du Mobiliscope propose tout un ensemble de cartes et de graphiques interactifs pour suivre l’évolution de la population présente dans les territoires au cours des 24 heures de la journée selon le profil des individus, la nature de leurs activités et le mode de transport utilisé. Il permet ainsi d’étudier, au fil des heures, les changements de composition des quartiers et l’évolution de la ségrégation sociale.Le Mobiliscope s’inscrit dans une démarche de science ouverte en s’attachant à respecter les principes FAIR (« Faciles à trouver, Accessibles, Interopérables et Réutilisables »). Les données des populations présentes dans les différents territoires par heure et par catégorie (sexe, groupes d’âge, groupes socioprofessionnels, etc.) sont ainsi proposées au téléchargement sous des formats et licences libres.

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Voir tous les dossiers[Dossier] Numérique éducatif rentrée 2022 : état des lieux des projets en cours et des nouvelles initiatives
Avant-proposComme chaque année, la circulaire de rentrée du Ministre de l'éducation nationale décrit les priorités et les nouveautés qui entrent en vigueur à partir de septembre. S'agissant du numérique éducatif, la circulaire prévoit que chaque école ou établissement, devra « actualiser en cette rentrée les plans de continuité pédagogique élaborés et mis en œuvre depuis 2020 ». Elle annonce, à ce propos qu’une « solution pérenne et souveraine de classe virtuelle accessible à tous les professeurs sera désormais garantie toute l'année ».« Face au défi pour nos élèves de comprendre l'univers numérique, et notamment de savoir analyser, trier, distinguer les informations dont chacun peut désormais être l'émetteur autant que le récepteur », la circulaire prévoit de renforcer l'effort en matière d'éducation aux médias et à l'information : « L'ensemble des professeurs, autour notamment des professeurs documentalistes qui en sont le pivot dans le second degré, doivent sensibiliser et former à cette nécessaire prise de distance, première qualité d'un citoyen éclairé. Dans cet esprit, une expérimentation sera mise en place en classe de sixième dès la prochaine rentrée via une attestation de sensibilisation au numérique ».La crise sanitaire et la mise en place de la continuité pédagogique ont rendu nécessaire la mise en place un « socle numérique de base pour les écoles, collèges et lycées ». Dans le cadre d’un « comité des partenaires » associant représentants des associations représentatives des collectivités et l'État « dans le respect des compétences de chacun », trois référentiels concernant l'équipement numérique de base à l'école, au collège et au lycée ont été discutés, puis rendus publics.On dispose, en cette rentrée, d'une première évaluation du programme « Territoires numériques éducatifs » (TNE), lancé en 2020, qui doit permettre de tester, à grande échelle, la mise en œuvre de la continuité pédagogique.Dans le cadre du programme « Numérique Inclusif, Numérique Éducatif » lancé en juin 2021 , 80 projets sélectionnés soutiennent des projets de lutte contre les fractures numérique et éducative.Dans le cadre de France 2030 (qui prend le relais du plan de relance), un effort d'investissement considérable (594 millions d’euros) est consacré à la stratégie d’accélération « Enseignement et numérique ».SommaireÉtat et collectivités s’accordent autour des socles d'équipement numérique pour l'école, le collège et le lycéeNumérique éducatif et inclusif : 80 projets pour « rebattre les cartes de l’enseignementDispositif « territoires numériques éducatifs », quels enseignements tirer de l’expérimentation ?La stratégie enseignement et numérique de France 2030Vers une généralisation de l’éducation aux médias et à l’information dans les écoles, collèges et lycéesLes états généraux du numérique pour l’éducation, un an après, quel bilan intermédiaire ?« Que sait-on aujourd’hui de la place et de l’utilisation du numérique à l’école ? »
Etat et collectivités s’accordent autour des socles d'équipement numérique pour l'école, le collège et le lycéeMalgré des efforts financiers conjugués conséquents, le déploiement du service public du numérique éducatif s’est opéré de façon très disparate et inégale sur l’ensemble du territoire. « Pour remédier aux inégalités persistantes d’accès au service public numérique », la Cour des Comptes dans son rapport de juillet 2019 recommandait « de doter écoles, collèges et lycées d’un socle numérique de base ».La crise sanitaire et la mise en place de la continuité pédagogique ont rendu nécessaire la mise en place un « socle numérique de base pour les écoles, collèges et lycées ».Dans le cadre d’un « comité des partenaires » associant représentants des associations représentatives des collectivités et l'État «dans le respect des compétences de chacun », trois référentiels concernant l'équipement numérique de base à l'école, au collège et au lycée ont été discutés, puis rendus publics.Ces référentiels détaillent, pour chaque type d'établissement (école, collège et lycée) un socle de base : Ces référentiels « visent à éclairer les collectivités compétentes dans leurs investissements, en fonction du niveau d’équipement attendu dans leurs écoles, collèges et lycées. Ils n’ont pas de valeur de prescription mais plutôt de référentiel pouvant être éventuellement adapté en fonction des projets pédagogiques des établissements et des réalités de terrain. Il est entendu, que l’État, dans les compétences qui sont les siennes assure notamment la formation des enseignants aux usages pédagogiques du, et par, le numérique ».l’équipement de base de la salle de classe : un système de visualisation collective et un poste de travail pour la classe ;les équipements mobiles mutualisables pour chaque établissement pack de tablettes tactiles (collèges et lycées) ;les équipements permettant l’hybridation des cours dans les établissements (lycées) ;les équipements des salles « spécifiques » d’enseignement disciplinaire (collèges et lycées) ;l’équipement de l’établissement (centre de documentation et d’information, salle multimédia, espace pour un studio média, salle de permanence, salle des professeurs, des points d’accès « libres » à l’internet pour les élèves (collèges et lycées) ;l’accompagnement et la formation des enseignants et équipes éducatives à la prise en main des nouveaux matériels ;le réseau informatique ;l’accès à internet.
Numérique éducatif et inclusif : 80 projets pour « rebattre les cartes de l’enseignement »L’appel à projets « Numérique Inclusif, Numérique Éducatif » a été lancé par la Banque des Territoires en juin 2021 pour soutenir des projets de lutte contre ces deux fractures : numérique et éducative. Après deux vagues de sélection, l’une ayant eu lieu courant de l’automne 2021 et la seconde au printemps 2022, les 80 projets sélectionnés maillent aujourd’hui l’ensemble du territoire.80 projets retenusDeux tiers des projets sélectionnés sont portés aux deux tiers par des associations, un quart par des entreprises EdTech et des collectivités territoriales. Quand des structures de l’ESS ne sont pas elles même porteuses de ces projets, elles en sont la plupart du temps partenaires.40% des publics ciblés sont des élèves, dont 20% de jeunes en situation défavorisée. Les parents et les professionnels de l’éducation représentent respectivement 19% et 16% des publics visés.Au-delà du soutien financier à ces projets, la Banque des Territoires met également en place un dispositif d’accompagnement resserré auprès des lauréats, qui vise à accompagner les projets dans leur passage à l’échelle.Trois convictions à l’origine de l’appel à projetsLa Banque des Territoires met en avant trois convictions qui sous-tendent ce dispositif.La première est que « les solutions existent déjà et surtout, qu’elles sont issues des territoires. La France se démarque par l’hétérogénéité de son territoire, et donc la pluralité de ses enjeux. Calquer une solution sur un territoire est souvent inutile, voire contreproductif ».La seconde, « c’est que les acteurs de l’écosystème œuvrent déjà ensemble. (…) . Les acteurs ont l’envie de mutualiser et de créer des synergies, d’avoir une meilleure visibilité sur l’existant pour ne pas réinventer mais plutôt agir en complémentarité. L’appel à projets avait aussi pour but de faire se rencontrer les acteurs, et de les faire discuter entre eux – que ce soit pour porter ensemble des projets, ou bien de partager leurs bonnes pratiques ».La troisième est que « sans travailler aux enjeux de l’inclusion, il n’est pas possible de construire des solutions éducatives efficaces et pérennes ».
Dispositif « territoires numériques éducatifs », quels enseignements tirer de l’expérimentation pour la continuité pédagogique ?Le programme « Territoires numériques éducatifs » (TNE), lancé en 2020 par le ministère de l’Éducation nationale et le Secrétariat général pour l’investissement (SGPI) et mis en œuvre par la Banque des Territoires avec les collectivités partenaires, en association avec le Réseau Canopé et le GIP Trousse à Projets, devait permettre de tester, à grande échelle, la mise en œuvre de la continuité pédagogique, dont la nécessité avait été révélée par la crise sanitaire liée à la COVID-19.Le rapport d’évaluation du dispositif TNE tire les premiers enseignements des expérimentations menées dans les départements de l’Aisne et du Val-d’Oise durant l’année scolaire 2020-2021.Lire la suite
La stratégie enseignement et numérique de France 2030France 2030 s’inscrit dans la lignée du plan France Relance. Ce plan d’investissement de 30 milliards d’euros, doit permettre de rattraper le retard de la France dans certains secteurs historiques. Il vise aussi la création de nouvelles filières industrielles et technologiques.Dotée de 594 millions d’euros dans le cadre de France 2030, la stratégie d’accélération « Enseignement et numérique » doit répondre à deux impératifs : Elle se fixe plusieurs objectifs : Actions lancéesrenforcer les aptitudes et les compétences nécessaires pour préparer à une formation tout au long de la viefavoriser la mise en place d’un écosystème d’éducation numérique français hautement performantAccroître l’efficience de notre système d’enseignement avec le renforcement des outils d’orientation, portfolios des compétences, ressources éducatives labellisées, aide à la personnalisation des parcours, ou encore les actions pour réduire les fractures numériques renforcer la stratégie d’accélération « Enseignement et numérique ».Transformer et renforcer l’économie de la EdTech : « la EdTech (Educational technology) représente un secteur économique dynamique à fort enjeu de compétitivité dans lequel investissent massivement les grands pays(…) La crise sanitaire a confirmé la nécessité du passage à l’échelle supérieure de nombreux acteurs pour absorber la demande future »Offrir un cadre qui préserve la souveraineté et la capacité d’influence : « au-delà de l’impact économique immédiat pour la EdTech française, le recours à des solutions numériques étrangères est synonyme de captation des données. Enjeux essentiels, la protection des données personnelles et la souveraineté liée à notre système national d’enseignement doivent être préservés avec des solutions pérennes et sécurisées ».Un « Programme Equipements Prioritaires et de Recherche » (PEPR) « Enseignement et numérique » doté de 77 M€ sur 10 ans permettra de constituer un entrepôt de données éducatives (Education Data Hub) à même de contribuer à la fois à un pilotage par la donnée des établissements et des académies, mais aussi à un travail affiné des enseignements à partir des traces d’apprentissages, et des EdTech pour les ressources existantes et à créerDes Démonstrateurs qui permettront de tester, d’accélérer et de repérer les meilleures pratiques pour accélérer les usages du numérique dans l’enseignement :Des « démonstrateurs numériques territoriaux » sont ainsi déployés pour 3 ans dans le scolaire (12 Territoires Numériques Educatifs) et dans le supérieur (17 Démonstrateurs qui couvrent 70 établissements français d’enseignement supérieur)Des démonstrateurs communs à l’enseignement scolaire et à l’enseignement supérieur comme Avenir(s) doté de 30 M€ piloté par l’ONISEP et l’Université Savoie-Mont-BlancDes solutions pédagogiques fondées sur les outils numériques au travers de Challenges Education et de Partenariats d’innovation en Intelligence Artificielle, ou le soutien au déploiement des projets E-FRAN.La formation initiale et continue au numérique des enseignants et des personnels qui accompagnent la transformation pédagogique avec des formations innovantes dans le cadre de l’appel Compétences et métiers d’avenir.
Vers une généralisation de l’éducation aux médias et à l’information dans les écoles, collèges et lycéesInscrite dans la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation, incluse dans le Socle commun des connaissances et des compétences et de culture en 2015, l’éducation aux médias et à l’information (EMI) est entrée officiellement en tant que telle dans les nouveaux programmes de l’Education Nationale, après avoir longtemps campé dans ses marges.Dans une note d’analyse, le Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco) observait, toutefois, que l’institution scolaire ne paraît pas, pour autant, « pleinement accompagner les jeunes dans un univers informationnel en mutation marqué par des débats forts autour des réseaux sociaux et des infox qui s’y propagent. Ainsi, l’éducation aux médias, en tant qu’objet d’étude, n’est abordée que dans la moitié des collèges et lycées. Celle-ci semble se résumer, le plus souvent, à une éducation par les médias (en utilisant des supports d’information de type article de journal ou documentaire télévisé), même si, à l’école, les élèves considèrent largement que les cours d’enseignement moral et civique (EMC) leur permettent de mieux comprendre l’actualité ».Le Ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports annonce de nouvelles initiatives pour renforcer et généraliser l’éducation aux médias et à l’information.Lire la suite
Les états généraux du numérique pour l’éducation, un an après, quel bilan intermédiaire ?Le Ministère de l’éducation organisait les 4 et 5 novembre 2020 des Etats Généraux du Numérique pour l’éducation (EGNé).Ces Etats Généraux avaient été préparés en en trois étapes : La stratégie du numérique éducatif définie à l’issue des Etats généraux reposait sur trois piliers : former, équiper et outiller.Élaboration d’un retour d’expérience (du confinement à la fin de l’année scolaire ordinaire) ;Organisation d’une concertation en ligne (de la mi-juin à la mi-septembre) ;États généraux dans les territoires (de la mi-septembre à la mi-octobre).Lire la suite
[Dossier] « Que sait-on aujourd’hui de la place et de l’utilisation du numérique à l’école ? »La direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) du Ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports a entrepris de faire le point sur « ce que l’on sait aujourd’hui de la place et l’utilisation du numérique à l’école ».Cette synthèse s’appuie sur une décennie d’études, sur les publications récentes de la DEPP et sur les évaluations de plusieurs dispositifs mis en place pour développer la place du numérique dans l’enseignement (D’COL, les Collèges connectés, ou plus récemment le Plan numérique).Lire la suite

Quel premier bilan du volet numérique de la présidence française de l’Union européenne (PFUE) ?
La présidence française de l’Union européenne (PFUE) est arrivée à son terme le 30 juin.Cette présidence a permis une série d'éléments qui pourrait être considérée comme des avancées.En matière d'autonomie technologique, la France souhaitait accélérer le lancement de quatre projets importants d’intérêt européen commun (PIEEC) durant sa présidence. Les PIIEC permettent de mobiliser des milliards d’euros d’investissements dans des usines, sans respecter les restrictions en matière d’aides d’État, à condition que plusieurs États se coordonnent.A l'occasion de la Conférence sur la souveraineté numérique européenne, le 7 février, douze États membres ont manifesté leur volonté de pré-notifier dès le printemps 2022 auprès de la Commission européenne, un PIIEC dans le domaine de l'informatique en nuage (Cloud). Dans ce cadre, ce sont jusqu’à 7 milliards d’euros de financements publics et privés européens qui pourront être mobilisés pour relever ce défi stratégique. La Commission européenne a proposé le 7 février un ensemble complet de mesures visant à garantir la sécurité d'approvisionnement, la résilience et la souveraineté technologique de l'UE dans le domaine des semi-conducteurs. Le Sommet spatial de Toulouse des 16 et 17 février a permis des avancées pour la création d’infrastructures européennes souveraines. L’Union européenne se dotera d’une constellation de connectivité autonome et a convergé sur une vision commune en matière de gestion du trafic spatial pour préserver nos satellites des collisions et actes hostiles.S'agissant de la régulation du numérique, la Présidence française a ouvert la voie à l’adoption de deux textes majeurs : le Digital Market Act (DMA) et le Digital Services Act (DSA), qui visent à mieux réguler les activités économiques des géants du numérique et à lutter contre la diffusion de contenus illicites. Les deux textes pourraient entrer en vigueur avant la fin de l’année.La création d’une équipe de travail européenne chargé de proposer une initiative européenne pour les communs numériques avait été annoncée en février : le rapport sur les communs numériques rendu public les 21 et 22 juin énonce une série de propositions.La Déclaration de Strasbourg sur les valeurs et défis communs aux administrations publiques européennes, adoptée par les ministres en charge de la fonction publique des 27 États membres, pour sa part, prévoit « de promouvoir les logiciels open source au sein des administrations publiques ainsi que leur partage ».
Deux lois phares pour réguler les plateformes numériquesConclu le 24 mars, le Digital Market Acts (DMA) vise à mieux encadrer les activités économiques des plus grandes plateformes, afin de réduire la dépendance des entreprises et des consommateurs vis-à-vis de leurs services et favoriser la concurrence des autres sociétés. Avec cette législation, les grandes plateformes ne pourront par exemple plus imposer des logiciels ou applications par défaut ou en empêcher la désinstallation, favoriser leurs services ou leurs produits, ou encore réutiliser les données personnelles à des fins de publicité ciblée qu’en cas de consentement explicite. En cas d’infraction, des amendes lourdes sont prévues, pouvant aller jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires mondial de l’entreprise concernée.
Quant au Digital Services Act (DSA) sur lequel un compromis a été trouvé le 23 avril, il a pour objectif de limiter la diffusion de contenus illicites (incitations à la haine ou à la violence, harcèlement, pédopornographie, apologie du terrorisme, etc.) et la vente de produits illicites en ligne. Les grandes plateformes devront permettre aux États membres d’accéder à leurs algorithmes et de mettre en place un outil permettant aux utilisateurs de signaler les contenus et produits illicites (messages terroristes, appels à la haine ou à la violence, harcèlement, etc.) afin que les plateformes les retirent ou en désactivent rapidement l’accès. Le DSA interdit de cibler des personnes avec des publicités en ligne basées sur leur religion, leurs préférences sexuelles, des informations sur leur santé ou leurs convictions politiques. La publicité ciblée est également interdite vis-à-vis des mineurs.
Une déclaration commune sur la "double transition" numérique et environnementaleA l'occasion de l'Assemblée numérique, 18 états membres ont abouti à une déclaration commune sur la "double transition" numérique et environnementale. 18 États Membres appellent ainsi à définir, d’ici 2026, des objectifs pour maximiser l’utilisation du numérique en faveur de la transition écologique tout en limitant son empreinte carbone et environnemental.Ils s’engagent par ailleurs à poursuivre l’effort pour :
réduire les dépendances européennes (semi-conducteurs, matières premières, etc.) dans le secteur numérique ;
diminuer l’empreinte carbone et environnementale des infrastructures numériques (data centers ; processeurs ; infrastructures de réseaux ; etc.) et des équipements électroniques, dont la production représente près de 75 % de l’empreinte carbone du secteur ;
développer une méthodologie commune pour mesurer de manière scientifique l’empreinte carbone du secteur numérique. La présidence française se félicite d’avoir pu inscrire ce sujet à l’agenda européen au Conseil Télécom du 3 juin 2022 et d’avoir pu négocier une déclaration avec les États Membres avant la fin de sa présidence.
Une initiative européenne de 19 états membres autour des communs numériquesA l’occasion de l’Assemblée numérique co-organisée à Toulouse les 21 et 22 juin par la présidence française et la Commission européenne, le rapport sur les communs numériques, initié par la France, a été présenté aux participants.Le rapport formule quatre propositions :
la création d’un guichet unique européen pour orienter les communautés vers les financements et aides publiques adéquats ;
le lancement d’un appel à projet pour déployer rapidement une aide financière aux communs les plus stratégiques ;
la création d’une fondation européenne pour les communs numériques, avec une gouvernance partagée entre les États, la Commission européenne et les communautés des communs numériques ;
la mise en place du principe « communs numériques par défaut » dans le développement des outils numériques des administrations publiques.
La Déclaration de Strasbourg sur les valeurs et défis communs aux administrations publiques européennesLe 17 mars 2022 les ministres en charge de la fonction publique des 27 États membres ont signé une déclaration commune « sur les valeurs et défis communs aux administrations publiques européennes ».Cette déclaration est construite autour de trois axes
Des fonctions publiques attractives, modernes et innovantes qui donnent l’exemple
Des services publics transparents et résilients qui répondent aux attentes des usagers
Des services publics numériques de qualité, inclusifs qui respectent les valeurs européennes
Cette déclaration prévoit, notamment « de promouvoir les logiciels open source au sein des administrations publiques ainsi que leur partage, en :
Reconnaissant le rôle majeur joué par les solutions open source sécurisées dans la transformation des administrations publiques, qui permettent de mutualiser les investissements entre de multiples organisations, offrent une transparence et une interopérabilité par défaut et garantissent une maîtrise sur les technologies utilisées ainsi qu’une plus grande indépendance technologique ;
Tirant parti des solutions open source pour renforcer la collaboration entre les administrations publiques, en favorisant le partage de telles solutions crées ou utilisées par les administrations au sein de l’Union européenne ;
Promouvant une redistribution équitable de la valeur créée par les solutions libres, notamment pour ceux qui produisent et partagent du code source ouvert ».

[Dossier] « Il s’agit moins de convaincre que de mobiliser », quelle place du numérique en période de campagne des élections présidentielles ?
Avant-proposLes outils numériques ont, au fil des années, profondément transformé les campagnes électorales. Les réseaux sociaux modifient la manière dont les électeur.rice.s « suivent » la campagne (les sondages, les initiatives et les « coups » politiques des candidats, ses péripéties). Ils permettent aux plus concerné.e.s d’entre eux/elles, de prendre une part active à la campagne : en relayant les thématiques, les argumentaires, les vidéos de leur candidat.Les équipes de campagne, pour leur part, mettent en œuvre de véritables stratégies numériques pour susciter, activer, coordonner l’engagement de ces militant.e.s numériques d’un nouveau genre, très majoritairement non encartés dans les partis politiques.En ce sens, le numérique enrichit et renouvelle le « répertoire d’action électorale » : avec de nouvelles modalités d’engagement pour les citoyens, et de nouvelles manières de « faire campagne » pour les candidats et leurs équipes.Malgré une profusion de baromètres qui scrutaient la présence numérique des candidats et la mobilisation de leurs partisan.e.s, la question de l’impact des réseaux sociaux, des nouvelles formes de « militantisme numérique » sur la formation des choix électoraux, et plus largement sur la « fabrique de l’opinion » reste assez largement ouverte.
SommaireQuels usages numériques en période électorale ?2022 : Une profusion de baromètres pour scruter l'engagement et la mobilisation des électeur.trice.s sur les réseaux sociauxLes sciences sociales pointent une surestimation de la contribution des réseaux sociaux à la formation des opinionsLes messageries instantanées, face invisible des campagnes numériquesNouvelles recherches, nouveaux questionnements autour des usages politiques du numérique
Quels usages numériques en période électorale ?La principale source de connaissance des pratiques numériques des électeur.rice.s reste l’Enquête électorale française (ENEF), réalisée par Ipsos pour le compte du Cevipof, du Monde et de la Fondation Jean Jaurès.Portant sur un panel de 10 000 personnes, interrogées onze fois entre avril 2021 et mai 2022, l'ENEF combine des questions relatives aux opinions et aux intentions de vote avec des questions relatives aux moyens de s’informer des électeurs ainsi que sur leurs modes d’engagement. Elle « permet d’étudier des pratiques minoritaires (par exemple liker un candidat) et d'analyser le profil de certains groupes, opérations qui n’auraient aucune significativité statistique avec un échantillon standard de 1000 individus même parfaitement représentatif ».Le Cevipof n’a publié, à ce jour, que quelques données fragmentaires relatives aux pratiques informationnelles des électeur.rice.s lors de la présidentielle 2022., interrogés sur « les 15% déclaraient avoir ». Au second rang des moyens de s’informer, juste après les émissions politiques à la télévision, mais devant la presse écrite et les programmes des candidats reçus dans les boites aux lettres.A partir de l’Enquête électorale française, Thierry Vedel avait distingué lors de la trois types de pratiques informationnelles en matière politique :S’agissant des réseaux sociaux, Thierry Vedel observait que « concluait Thierry Vedel
On y apprend qu’en seuls 7% des 11 000 répondants citaient les « comme « » et 19% comme l’un des « principaux moyens de le faire.décembre 2021, réseaux sociaux, forums et blogs »premier moyen de s’informer sur l’actualité politique»
En avrildifférentes manières de s'informer sur les programmes des candidats, laquelle avez-vous privilégié ? »,« cherché des informations sur Internet2017 : trois types de pratiques informationnelles en matière politiquecampagne 2017,Environ 15 % des électeurs ont des pratiques informationnelles intensives et plurimodales, c’est-à-dire qu’ils utilisent plusieurs sources d’information en cumulant supports traditionnels et supports en ligne : écoute régulière des informations télévisées, partage d’information sur les réseaux sociaux, visionnage des clips de campagne, lecture des professions de foi, etc. Lors de la campagne, ce groupe a intensifié ses activités politiques en ligne, mais modérément dans la mesure où elles étaient déjà élevées au départ.D’autres électeurs (environ 45 % de la population) ont des pratiques informationnelles plus fragmentées et plus sporadiques. Ils combinent en général deux supports (télévision et presse écrite pour les plus âgés, télévision et réseaux sociaux pour les jeunes gens). C’est dans ce groupe que les activités politiques en ligne se sont le plus intensifiées au cours de la campagne.Enfin, un troisième groupe (environ 40 % de la population) a des pratiques informationnelles en matière politique extrêmement réduites qui se résument souvent au visionnage de la télévision. Ce groupe, bien que fortement présent sur les réseaux sociaux, utilise assez peu l’internet pour suivre les élections.2017 : Ce sont surtout les électeur.rice.s les plus politisé.e.s et les plus diplômé.e.s qui sont les plus actifssi environ les deux tiers des électeurs ont un profil ou un compte sur les réseaux sociaux, seule une minorité y a recours pour échanger ou exprimer des opinions politiques. Ce sont surtout les électeurs les plus politisés et les plus diplômés qui sont les plus actifs. Au-delà de la recherche d’information, l’internet n’est pas (encore) devenu un espace majeur du débat politique. Ce qui ne signifie pas qu’il soit sans importance dans la compétition électorale ». « S’’il y a une distinction à établir », , « elle ne réside pas dans les sources mais dans les pratiques informationnelles (…). Le facteur principal qui a commandé ces pratiques informationnelles au cours de la campagne présidentielle est l’intérêt pour la politique : plus celui-ci est élevé, plus les pratiques informationnelles sont diversifiées et fortes (...). Ce n’est pas tant l’internet qui conduit à la politique, mais bien l’intensité de la politisation qui suscite un recours à l’Internet ».
2022 : Une profusion de baromètres pour scruter l'engagement des électeurs sur les réseaux sociauxIl semblait acquis pour de nombreux observateurs - et pour les médias - que les réseaux sociaux allaient constituer un enjeu essentiel, voire décisif, de la campagne présidentielle : à la fois un fois terrain de jeu pour les candidats et leurs soutiens, et terrain d'observation permettant de suivre, voire même d’anticiper, des évolutions de l’opinion et les dynamiques de campagne.Plusieurs facteurs expliquent cette focalisation de l'attention sur les réseaux sociaux : Une profusion de baromètres et d'observatoires ont été mis en œuvre par des cabinets spécialisés afin de mesurer la visibilité des candidats sur les réseaux sociaux et de scruter la mobilisation de leurs relais et sympathisants : nombre de posts mentionnant chaque candidat, pourcentage d'abonnés gagné par les candidats, nombre moyen d'interactions par publication sur l’un ou l’autre des réseaux sociaux, publications Facebook ayant suscité le plus de réactions, vidéos liée à la présidentielle la plus likées sur YouTube ou sur TikTok, tweets les plus partagés, post Instagram les plus likés etc.En premier lieu, l’idée s’est installée, fin 2021, dans un contexte sanitaire encore incertain, qui limitait les grands rassemblements (aucun candidat ne souhaitant voir un de ses meetings se transformer en cluster) que l’issue de la campagne se jouerait, en partie, sur les réseaux sociaux.L’avènement de nouvelles plateformes (TikTok et Switch) fréquentées principalement par un public de jeunes adultes dont le taux d’abstention est souvent élevé. Si la campagne numérique s’était déployée, en 2017, essentiellement sur YouTube, Facebook et Twitter, la campagne 2022 voyait l’émergence de nouvelles arènes numériques, Instagram, TikTok et Switch, et, avec ces plateformes, le déploiement de nouveaux formats : les interviews participatives de Twitch, les formats courts de TikTok.L’irruption dans la campagne d’une nouvelle génération d’influenceurs, qui affichaient leur volonté de réconcilier la jeunesse avec la politique, comme HugoDécrypte, et ses 1,9 millions d’abonnés sur TikTok, 1,6 sur Instagram, 2 millions sur YouTube, 214 000 sur Twitch.Autant de mesures et de métriques largement commentées par les médias :Twitch, Snapchat, TikTok : quand le numérique tente de reconnecter les jeunes à la politique ? Quel candidat a tiré son épingle du jeu sur les réseaux sociaux en janvier ? Quel candidat a fait le plus de bruit en décembre sur les réseaux sociaux ? Twitch peut-il faire reculer l'abstention des jeunes ?
Les sciences sociales pointent une surestimation de la contribution des réseaux sociaux à la formation des opinionsAutour de la place du numérique dans les campagnes électorales, a vu le jour un champ de recherche, au croisement de la science politique, de la sociologie, des data sciences et des sciences de l'information.Les universitaires, invités par les médias à commenter, tout au long de la campagne, les évolutions du nombre d’abonnés aux comptes Facebook ou Twitter de tel ou tel candidat, ou la mobilisation différentielle de leurs soutiens, firent preuve d’une grande prudence.« Les effets qu'on attribue aux réseaux sociaux en terme d'influence sur le résultat des élections sont surestimés »Pour Fabienne Greffet, chercheuse en science politique de l’Université de Lorraine, en février, sur FranceBleu, « les effets qu'on attribue aux réseaux sociaux en terme d'influence sur le résultat des élections sont surestimés. On a de la difficulté à mettre en relation le nombre de personnes concernées avec ce qui se donne à voir sur les réseaux sociaux, il y a toute une part de mise en scène et donc il faut avoir en tête que l’on peut aussi être en butte à des dizaines de stratégies de recherche d'influence, sans pour autant que les groupes mobilisés représentent des centaines ou des milliers de personnes. Et justement, un des effets recherchés ça peut-être de faire croire qu'un candidat est très soutenu ou très attaqué sur les réseaux sociaux, alors qu'en fait, l'opération est menée par un petit groupe ».« Quand on observe la cartographie des réseaux, on observe que les communautés numériques les plus actives sont idéologiquement très homogènes. Il y a finalement peu d'échanges entre les communautés. Il s'agit plus souvent d'échanger des contenus avec des personnes qui pensent comme nous puisque généralement, notre réseau relationnel est plutôt constitué de personnes qui pensent comme nous. »Les citoyens actifs sur Internet plus radicaux Cinq chercheur.euse.s, Marie Neihouser, Felix-Christopher von Nostitz, François Briatte, Giulia Sandri et Tristan Haute rappelaient, en avril 2022, dans TheConversation que les usages électoraux des réseaux sociaux, s'ils se développent depuis 2012, restent cependant relativement minoritaires.« Les commentaires à la suite de messages de candidats restent relativement peu nombreux tant sur Twitter que sur Facebook (…) si on les rapporte au nombre d’inscrits sur les listes électorales, ou même au nombre de personnes inscrites sur les réseaux sociaux en France (40 millions d’utilisateurs mensuels de Facebook, 8 sur Twitter, 22 sur Instagram, 50 sur YouTube). Surtout, certains candidats ne récoltent que quelques centaines de commentaires – ou même moins. Même si l’on regarde le nombre de likes, pratique moins coûteuse pour les internautes que le commentaire, les réactions aux messages des candidats restent relativement rares, a fortiori lorsqu’on les compare à leurs nombres d’abonnés ». « On sait que les citoyens politiquement actifs sur Internet présentent différentes caractéristiques : ils sont plus intéressés par la politique, plus diplômés, et plus jeunes que la moyenne ».Les publications en ligne touchent avant tout les publics déjà acquis à la cause« Depuis plusieurs semaines et parfois plusieurs mois, les candidats occupent le plus possible leur territoire de visibilité, c’est-à-dire l’intégralité des réseaux sociaux – ou presque – et les médias traditionnels. Mais il est très difficile de mesurer l’impact que peuvent avoir les différentes formes de communication numérique sur les comportements électoraux », observait, pour sa part, Stéphanie Wojcik (Université Paris-Créteil), interrogée par Usbek & Rica.« On dit souvent, et à juste titre, que les publications en ligne touchent avant tout les publics déjà « captifs », à savoir les militants et les sympathisants – bref, tous ceux déjà acquis à la cause. »« Pour les candidats, tout l’enjeu consiste à élargir le cercle habituel de leur audience. Bien sûr, il paraît évident que si vous vous acculturez correctement à un dispositif spécifique comme TikTok, sur lequel vous produisez des vidéos courtes avec un ton plutôt humoristique ou léger, vous allez capitaliser sur l’audience de ce réseau (…). Mais il peut aussi exister une contradiction entre ces impératifs et la communication politique électorale en tant que telle, qui ne se satisfait pas toujours de durées aussi courtes. Parfois, il peut carrément être contreproductif pour un responsable politique de tenter d’aller sur une plateforme où il n’est pas très à l’aise. »Pour Jen Schradie, chercheuse à SciencePo (auteure de "L'illusion de la démocratie numérique. Internet est-il de droite ?"), « les réseaux sociaux fonctionnent comme des mégaphones ou des projecteurs, qui déforment ce qui se passe dans la réalité de plein de manières, et la campagne présidentielle française n’a pas échappé à cela ». Les réseaux sociaux en campagne comme un meeting à ciel ouvertPour Olivier Ertzscheid, Maître de conférences en Sciences de l'information et de la communication à l'Université de Nantes, auteur du blog Affordance, c'est l'image du meeting qui apparaît « la plus appropriée pour arbitrer sur le rôle et la place que jouent réellement les réseaux sociaux dans une élection ».« Un meeting politique est un reflet d'une dynamique : la capacité d'y faire salle plus ou moins comble, la capacité d'y disséminer des éléments de langage et des clés d'analyse qui structureront ensuite et la campagne et l'opinion, la capacité de convaincre et de mobiliser bien sûr. Les réseaux sociaux sont tout cela à la fois ».Dans un meeting on ne croise que des convaincu.e.s. Plus de 90% des personnes qui se rendent à un meeting sont déjà concaincu.e.s et seuls quelques curieux ou opposants viennent achever d'en remplir les rangs. Or la manière dont on s'adresse à une salle composée de 90% de convaincu.e.s, et la manière dont cette salle agit et réagit, est sans aucune commune mesure avec la manière dont on peut s'adresse à une salle qui serait hostile ou en tout cas composée d'au moins autant de convaincu.e.s que d'opposant.e.s. C'est à peu près la même chose sur les réseaux sociaux généralistes ».Dominique Cardon sur RadioFrance, rappelait aux rédactions qu’elles « doivent avoir une culture numérique de l’enquête. Être capables d’évaluer quelle est la prévalence d’une thématique dans l’opinion. Et surtout ne pas considérer que ce qui se dit sur Twitter est le reflet de l’opinion publique. Ce serait une grave erreur. Car seule une partie très infime des français se retrouve sur ce réseau social. Souvent ce sont des journalistes, des gens diplômés et urbains. Peu représentatifs donc du reste de la population. Les sujets les plus commentés sur Twitter ne sont pas forcément ceux qui intéressent les Français ».
Les messageries instantanées, face invisible des campagnes numériquesMarie Turcan, rédactrice en chef du site Numerama, attire l’attention sur « ce que l’on ne voit pas… Derrière ce qui est public, Facebook, Twitter, vous avez un autre paysage numérique. Aujourd’hui, beaucoup de Français s'informent par ces canaux alternatifs, que sont les boucles et les messageries WhatsApp ou Telegram (…). Ce sont des phénomènes peu visibles, mais qui peuvent compter et avoir de l’influence. Je pense qu'il ne faut pas minimiser l'impact de ces sous-groupes qui peuvent rassembler des centaines de milliers d’internautes ».Un point de vue partagé, dans Mediapart, par Jen Schradie : « on manque sans doute un phénomène massif qui demeure une boîte noire, à savoir les boucles privées sur WhatsApp, Telegram, Signal ou les groupes privés sur Facebook, alors que c’est sans doute là qu’une partie de la politique numérique se joue ».Olivier Ertzscheid, pour sa part, voit « dans l'ensemble de ces partages invisibles de contenus (…) qui ne peuvent donc être ni observés, ni mesurés, ni comptabilisés (ou en tout cas beaucoup plus difficilement) un espace désormais déterminant et structurant pour l'ensemble des mouvements et des mobilisations politiques ou citoyennes ».Il pointe, à ce propos, « un paradoxe de visibilité qui peut s'exprimer de la manière suivante : les contenus ainsi "publiés" peuvent jouir d'une visibilité très forte dans les groupes privés où ils sont diffusés ou repris, mais leur visibilité "analytique" publique, celle qui permet d'observer et de tenir compte de leur viralité, est en revanche quasi-nulle ». Olivier Ertzscheid rappelle, au passage, que WhatsApp avait été abondamment utilisé par les partisans du candidat Jair Bolsonaro pour le faire élire lors de la campagne présidentielle de 2018.L'hypothèse d'une tripartition de l'espace politique Olivier Ertzscheid voit se dessiner une «tripartition pour l'ensemble des débats et élections à venir, en France comme ailleurs.En premier lieu et en premier tempo, reste et demeure la surface mass-médiatique de l'agenda politique et des influences partisanes (la télé et la presse continuent de jouer un rôle déterminant et crucial dans la fabrique de l'opinion).Vient en deuxième lieu et en deuxième tempo la surface sociale interpersonnelle partisane qui se donne à lire explicitement dans les réseaux sociaux généralistes et dans leurs logiques éditoriales propres (les Trending Topics de Twitter par exemple).Viennent enfin en troisième lieu les espaces sub-médiatiques d'influence, (le Dark Social ) principalement fait de messageries privées, et qui donnent aujourd'hui le troisième tempo de l'agenda électoral et politique ».
Nouvelles recherches, nouveaux questionnements autour des usages politiques du numériqueFabienne Greffet et Marie Neihouser ont entrepris, dans un appel à articles concernant « la digitalisation des répertoires d’action électorale », de retracer les débats qui traversent la communauté de chercheur.euse.s qui s’intéressent aux usages politiques des outils numériques.« Au tournant des années 2000, la littérature spécialisée de langue anglaise s’est fortement clivée autour d’une question: l’investissement des espaces numériques peut-il conférer des ressources supplémentaires à des formations politiques ou des candidats auparavant trop minoritaires pour accéder à des positions électives, ainsi qu’aux médias de masse ? »Les recherches se focalisent, dans les années 2010, sur la professionnalisation des campagnes numériques, avec le recours à des personnels spécialisés : conseillers en communication numérique, chargés de communication web, community managers, data scientists.En parallèle, prend naissance une interrogation « sur le degré d’initiative des citoyens engagés sur les espaces numériques » avec, selon les auteures, une tension entre deux types d’analyses : celles qui défendent l’idée selon laquelle « faire une campagne numérique consiste à perfectionner des techniques marketing de ciblage préexistantes » et celles qui estiment, au contraire « que les campagnes en ligne sont pour partie transférées des organisations partisanes vers les citoyens engagés ».En France, les recherches se focalisent sur les pratiques numériques des personnes les plus investies dans les partis. «De fait, ce que font les personnes qui s’engagent en ligne de façon éventuellement ponctuelle pour un candidat ou un parti est assez mal connu, surtout lorsqu’il s’agit de personnes plus distantes de l’organisation, dites « sympathisantes », dont les activités retiennent peu l’attention des chercheurs. En outre, la vive controverse lancée par l’essayiste Evgueny Morozov, sur le slacktivism ou « engagement mou », a contribué à dévaluer les activités numériques d’engagement par rapport à l’action de terrain, et à les considérer comme des leurres qui donnent bonne conscience en créant l’illusion d’agir alors qu’ils n’ont aucun impact réel sur la mobilisation ou les résultats d’une élection ».En conclusion, Fabienne Greffet et Marie Neihouser proposent aux futurs contributeurs trois axes de recherche et de réflexion :Les ressources et les acteurs de la digitalisation des répertoires d’action électorale. « Si certaines recherches se focalisent sur la professionnalisation des campagnes en ligne et l’apparition conséquente de nouveaux acteurs (data scientists, etc.), les ressources mises à disposition de ces nouveaux personnels afin de digitaliser les répertoires d’action électorale restent encore peu étudiées. Utilisent-ils les mêmes logiciels, les mêmes systèmes d’information ? Promeuvent-ils des « standards » de digitalisation ? En outre, la question se pose de comprendre comment se répartissent les rôles à l’intérieur des équipes de campagne entre « professionnels » (y compris des entreprises extérieures) et « amateurs », mais aussi entre organisation et communautés numériques sympathisantes, ou encore entre acteurs situés dans l’espace de la compétition électorale et acteurs situés géographiquement à l’extérieur (notamment à l’étranger) ».La digitalisation des répertoires d’action électorale en pratique. « En quoi de nouveaux supports, tels que les réseaux sociaux, sont-ils investis et avec quels objectifs ? Dans quelle mesure les répertoires d’action électorale sont-ils la continuation par d’autres moyens de répertoires d’action plus traditionnels ? Dans quelle mesure observe-t-on des ruptures, en s’appuyant par exemple sur des techniques de « propagande computationnelle » ou sur des actions numériques collectives telles que l’astroturfing, c’est-à-dire la création artificielle de ce qui apparaît comme un mouvement de masse et spontané en ligne ?Comment ces techniques et savoir-faire s’intègrent-ils à des répertoires de campagne plus large, notamment hors ligne ? »Les conséquences de la digitalisation des répertoires d’action électorale. « Dans ce troisième axe, ce sont les conséquences de la digitalisation des répertoires d’action électorale qui seront recherchées – tant du point de vue de l’organisation et des rapports de force au sein des partis et des équipes de campagne, qu’en termes d’activités et de contenus produits, ou encore d’évolution de l’intérêt et de la mobilisation des citoyens lors des campagnes électorales ».

Les notes stratégiques
Les notes stratégiques auront vocation à conseiller les acteurs publics locaux sur la manière d’appréhender le numérique au sein de leurs compétences administratives (logement, action sociale, urbanisme, environnement, aménagement du territoire,…)
Rapport
Voir tous les rapportsL'Observatoire de l’inclusion numérique 2022
Ce premier observatoire de l’inclusion numérique, réalisé par la Mednum, propose un panorama à jour de l’écosystème de l’inclusion numérique : qui en sont les acteurs, ce qu’ils font, avec quels moyens, outils et techniques.Cet état des lieux du secteur de la médiation numérique en France repose sur 42 entretiens individuels et collectifs et sur une enquête réalisée via la diffusion d’un questionnaire en ligne comprenant - en tout - 100 questions. Ce questionnaire a permis de récolter des données inédites grâce aux réponses de près de 430 structures sur des sujets variés : statuts, gouvernance, fonctionnement, pratiques, outils, modèles économiques, succès, besoins, freins à leur développement…Le Labo Société Numérique se propose de rendre compte de cet observatoire en trois principaux axes :#1 Un écosystème en développement pour accompagner des besoins croissants#2 Un écosystème qui se structure, des modèles économiques qui se cherchent#3 Des métiers et compétences variés, une filière professionnelle émergenteA retrouver ci-dessous dans la liste des sous contenus.

Les carnets des NEC Locaux
Les carnets des NEC locaux regroupent les reportages des événements et les approches, outils, territoires et personnes qui construisent les leviers de l’encapacitation au numérique des treize millions de Français·es éloigné·es de ce dernier.
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