À l’heure où l’on demande aux ménages de faire des efforts pour maîtriser leurs impacts environnementaux, une étude récente du CREDOC met en évidence que plus le niveau de vie est élevé, plus l’empreinte carbone des équipements numériques est importante. Les ménages aisés sont notamment davantage équipés en terminaux (ordinateurs, tablettes, etc.) que les ménages modestes. Ces travaux montrent également que l’empreinte carbone atteint son apogée chez les 18-24 ans, qui disposent d’équipements plus récents et plus diversifiés que leurs aînés.
Les dernières éditions du Baromètre du Numérique indiquent que les Français restent insuffisamment informés sur les usages les plus efficaces pour limiter l’impact environnemental de leurs pratiques numériques.
Référence :
Un calcul de l’empreinte qui combine deux référentiels
Cette étude innove en mobilisant deux types de données : les données du Baromètre du numérique 2023 relatives aux équipements et usages numériques et celles de la base NegaOctet, qui examine l’impact carbone des équipements numériques selon les classes d’âge et les niveaux de vie.
En combinant les données de ces deux référentiels, il est possible de mieux comprendre quelles catégories de la population génèrent les plus fortes émissions.
L'empreinte carbone de l'équipement numérique tient compte à la fois du taux d'équipement individuel, de la durée de détention des différents appareils et du type d'équipement détenu. Par exemple, la fabrication d'un poste de télévision émet en moyenne 4,5 fois plus de CO2 que celle d'un smartphone.
L’estimation de l’empreinte carbone du numérique tient compte du nombre d’équipements disponibles par personne dans le foyer (téléviseur, ordinateur fixe ou portable, tablette, smartphone, console de jeux), de la durée de détention des appareils et de l’empreinte carbone des différents équipements.
L’indice global obtenu permet de mettre en évidence des différences catégorielles sur l’impact carbone des équipements numériques.
Références :
Plus le niveau de vie des ménages est élevé, plus l’empreinte carbone des équipements numériques est importante
Cette empreinte est estimée à 118 kg CO2 par an pour les bas revenus, à 138 kg CO2e pour les hauts revenus.
Ces différences sont principalement dues à l’augmentation du taux d’équipement avec le niveau de revenu, la durée de détention des équipements étant comparable d’une tranche de revenu à l’autre.
Les bas revenus se distinguent par un taux d’équipement par individu plus faible quels que soient les terminaux : téléviseur, ordinateur, tablette ou téléphone mobile.
Les plus hauts revenus sont de leur côté plus équipés en ordinateur et tablette que le reste de la population, des équipements qui ont un impact carbone plus élevé.
L’empreinte carbone annuelle culmine chez les jeunes
L’indice calculé est nettement plus élevé chez les 18-24 ans que dans le reste de la population.
Les 18-24 ans ont à la fois un taux d’équipement par personne plus élevé pour l’ensemble des équipements considérés, et des durées de détention des appareils plus faibles. Cette spécificité pourrait au moins en partie être liée au cycle de vie : la tranche d’âge des 18-24 ans correspond pour beaucoup à l’accès à l’autonomie résidentielle, une période qui rime souvent avec équipement du logement et expliquerait que les jeunes possèdent des appareils plus récents.
Les écarts sont, en revanche, faibles entre toutes autres les tranches d’âge. Les 25-39 ans ont par exemple une empreinte très proche de celle des plus de 60 ans.
Si les équipements ont, en moyenne, une empreinte carbone supérieure à celle des usages, l’intensité de certains usages peut concurrencer le poids des équipements dans l’empreinte carbone totale d’un individu. « L’usage plus intensif du numérique des jeunes pourrait alourdir significativement l’empreinte numérique des jeunes », observent les aurteur.ice.s du CREDOC, qui mentionnent notamment l ’usage plus intensif du smartphone chez les 18-24 ans, celui des services de vidéo à la demande ou le visionnage de vidéos.
Les gestes permettant de réduire l’impact des usages numériques plutôt mieux respectés par les plus âgés
Dans leur étude prospective sur l’évaluation environnementale du numérique, l’ADEME et l’Arcep avaient formulé en 2023 trois recommandations pour diminuer l’impact des usages des ménages : allongement de leur durée de vie, limitation de leur nombre et généralisation de l’achat de matériel reconditionné.
- Allongement de leur durée de vie : 66% des Français.es cherchent à accroître la durée de vie de leurs équipements, en en prenant soin, en les faisant réparer etc. Il s’agit du deuxième geste le plus appliqué parmi onze proposés. Cette pratique n’est toutefois pas majoritaire chez les 18-24 ans (44 %) et moins répandue qu’en moyenne chez les 25-39 ans (58 %). Les plus âgés adhèrent davantage à ce geste (72 % à partir de 40 ans).
- La limitation du nombre d’équipements est observée par 49 % des Français.es. Là encore, cette pratique croît avec l’âge : seulement un tiers des 18-24 ans s’y astreignent, contre 61 % des 70 ans et plus. « Il semble que cette propension ne soit pas seulement déclarative : les plus jeunes disposent en effet d’une plus grande variété d’équipements. Toutefois, cette donnée doit être nuancée : les plus âgés bénéficient moins de la mutualisation des équipements, ce qui ne va pas dans le sens de la limitation de leur nombre. Rappelons par exemple que les plus de 70 ans possèdent, en moyenne, un peu plus d’un poste de télévision par personne, contre 0,6 pour les moins de 25 ans.
- Reconditionnement : seuls 28 % des internautes indiquent acheter le plus possible de terminaux numériques reconditionnés. Plus les internautes sont jeunes, plus ils déclarent adopter cette pratique, de 35 % des 12 à 17 ans à 19 % des 70 ans et plus. « Une moindre adhésion à ces modes de consommation au sein des générations les plus âgées, mais aussi les prix plus réduits de ces terminaux reconditionnés pourraient en partie expliquer ces différences » commente le CREDOC.
« Les Français prennent progressivement conscience de l’impact environnemental du numérique » conclut le CREDOC.
Seuls 52 % des Français.es s’estiment toutefois suffisamment informés, tandis que 45 % déplorent plutôt un manque d’information. Une large majorité, toutefois, affiche une réelle volonté de réduire l’impact de ses pratiques, en particulier en agissant sur la durabilité de ses équipements (80 %) et, dans une moindre mesure, en modérant ses usages numériques (69 %).
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