La France a fait ce pari depuis plusieurs années de l’ouverture des données publiques. En France, un cap important a été franchi franchi avec l'adoption de la loi pour une République numérique le 7 octobre 2016 qui prévoit la mise à disposition gratuite de certaines données du secteur public.
De nombreuses collectivités territoriales ouvrent désormais leurs jeux de données concernant les services publics, le budget, l'urbanisme, la vie culturelle, etc.
Les administrations elles-même bénéficient largement des bienfaits de l'open data, puisque grâce à l'échange de données et les outils d'analyse mis à leur disposition, les retours d'expériences s'en trouvent systématisés et facilités. Elles peuvent ainsi accéder à une connaissance plus fine et plus personnalisée des besoins des usagers, qui leur permet de remplir encore mieux leur mission de service public.
data.gouv.fr : plus de 600 000 consultations et près de 5 millions de pages vues par mois
La plateforme ouverte de données publiques data.gouv.fr compte fin octobre plus de 39 000 jeux de données, 206 344 ressources mis à disposition par plus de 2 379 organisations. Elles ont donné lieu à 1 938 réutilisations.
Références :
Depuis deux ans, l’utilisation de la plateforme data.gouv.fr augmente de manière régulière, pour atteindre 612 866 visites pour le seul mois d’octobre 2019, soit 4 829 616 pages vues dont 3 589 180 pages vues uniques) et 226 018 téléchargements dont 176 658 téléchargements uniques).
Le nombre de contributeurs actifs est ainsi passé en deux ans de 23 000 à 44 700 (en progression de 62 %).
Quant au visites mensuelles, leur nombre a augmenté de 140 % en deux ans.
Le ministère des finances publie l’intégralité des données foncières
La base DVF (demandes de valeurs foncières) produite par la Direction générale des finances publiques (DGFiP) est désormais accessible en open data. Elle contient toutes les informations – prix ou descriptif des biens, etc. – déclarées à l’occasion des mutations immobilières à titre onéreux (ventes ou adjudications notamment). Elle permet à chacun de connaître les prix réels des transactions et à des opérateurs spécialisés de proposer des outils pour évaluer un bien immobilier à acheter ou à vendre. Cette base donne accès au prix de vente et la date de transaction (d’un bien bâti ou non bâti), au descriptif du bien (nombre de pièces, surface, numéro du lot, etc) et la géolocalisation.
La Base DVF figure au premier rang des jeux de données les plus vus sur Data.gouv.fr, devant le Répertoire national des associations (ministère de l’Intérieur) et la Base Sirene des entreprises et des établissements (Insee).
460 collectivités territoriales engagées dans l’ouverture des données publiques
Selon l’Observatoire open data des territoire OpenDataFrance, en octobre 2019, 460 collectivités publient des données en open data, soit une progression de 34% en un an pour l’ensemble des collectivités (dont 54% pour les EPCI).
L’ouverture concerne, en premier lieu les métropoles et les grandes villes et 12 des 13 régions de France métropolitaine. 50 % des départements ont engagé à ce jour des démarches d’ouverture.
Référence :
97 collectivités (71%) publient les données sur un portail dédié, 31 (22,6%) sur le Géoportail et 9 (6,6%) sur le site web de la collectivité. Cette dernière option est tout à fait valable à condition que les données soient correctement documentées (métadonnées) et qu’elles soient faciles à trouver.
L’Observatoire open data des territoire apporte des indications détaillées sur la gouvernance des 171 plateformes territoriales (mutualisées ou dédiées), sur la fréquence de mise à jour des jeux de données publiés, sur les retards dans la mise à jour des données, sur les Licences utilisées (43% des collectivités ont opté pour la licence ouverte).
Les visualisations touchent plus de monde que les données brutes
Le 24 avril 2019, la direction générale des finances publiques a ouvert et mis en ligne la base de données DVF ( « Demande de valeur foncière »). Pour que cette base de données DVF ( « Demande de valeur foncière ») puisse être visualisée sur une carte sans qu’il soit nécessaire de les télécharger, ou de les manipuler, la mission Etalab a développé une application web : app.dvf.etalab.gouv.fr.
La Mission etalab tire, sur son blog, une série d’enseignements de cette réalisation et succès qu’elle a rencontrée.
- Les visualisations touchent plus de monde que les données brutes
- Bien configurer un serveur n’est jamais une mauvaise idée
- Documenter n’est pas une perte de temps
- Recueillir des avis permet d’améliorer l’expérience utilisateur
- Rendre le code public le rend meilleur
- Les critiques font partie du jeu
Référence :
La France parmi les pays en pointe
Plusieurs classements internationaux viennent conforter la place de la France parmi les pays leaders de l’ouverture des données publiques.
La France est à la deuxième place (derrière la Corée du Sud) parmi les pays de l’OCDE, selon l'indice OURData qui prend en compte la disponibilité, de l’accessibilité, de la qualité des données et du soutien public à leur réutilisation.
Elle se situe a la 3ème place, derriere le Japon et la Corée, sur le pilier 1 du critère « disponibilité des données » (qui combine « contenu de la politique d’ouverture par défaut », « association des parties prenantes à la divulgation des données »).
A la deuxième place (derrière l’Autriche) pour le pilier 2 du critère « disponibilité des données », qui combine « contenu de la politique d’ouverture par défaut », « association des parties prenantes au service de la qualité et de l’exhaustivité des données», « contenu de la politique d’accès sans restriction aux données ».
A la sixième place pour le critère «Soutien gouvernemental pour la réutilisation des données », qui combine « suivi de l’impact», « programmes de familiarisation avec les données au sein de l’administration») et « initiatives et partenariats visant à promouvoir les données»).
L'étude comparative commandée par la Commission européenne sur la maturité de l’ouverture des données dans les différents États membres (Open Data Maturity in Europe 2018), plaçait en 2018 la France au troisième rang (avec une maturité évaluée à 83 %), après l’Irlande (88 %) et l’Espagne (87 %).
Références :
Nouvelles questions, nouveaux enjeux
Selon Dominique Cardon, dans la somme qu'il a consacrée à la Culture Numérique, « les espoirs suscités en 2007 par le constat de la sous-utilisation des données dites brutes étaient sans doute un peu naïfs. En pratique, l’exploitation des premières données ouvertes a surtout fait apparaître de nouvelles questions et de nouveaux enjeux».
Du côté des usages citoyens, d’abord, «on constate qu’il est difficile de faire parler des données administratives puisque, pour respecter la vie privée des individus, il est impossible de travailler avec des fichiers nominatifs complets et qu’il faut agréger les données. Même si leur ouverture récente a pu enclencher des enquêtes journalistiques, par exemple sur l’attribution des fonds de la réserve parlementaire et sur les déclarations de patrimoine des élus. De fait, le data journalisme s’est orienté vers un tout autre usage des données publiques, consistant à produire des palmarès dans une logique de services pratiques rendus au public : classement des meilleures écoles ou universités, régions où il fait bon vivre, cartographie des quartiers selon la criminalité, etc. L’intention n’est pas de relever des faits d’intérêt général, mais plutôt de rendre un service spécifique à chaque citoyen. La valeur immobilière de ma rue est-elle en train de croître ? Le service de nettoyage de ma commune est-il efficace ? Les écoles de mon quartier ont-elles un bon taux de réussite ?
Du côté des usages économiques, «on s’est vite rendu compte que l’idée de données brutes était une fiction. Les données ne sont pas des entités naturelles qu’il faudrait extirper des griffes de leurs propriétaires pour qu’elles révèlent leur valeur sur les marchés. Toute donnée est liée à un contexte de production particulier, elle s’inscrit dans une chaîne de traitement spécifique, dans une métrologie destinée à lui faire produire tel ou tel type de signal. Libérée de son contexte pour être examinée dans un autre, la donnée brute risque de ne plus être interprétable» .
Dans une tribune, une vingtaine d'acteurs de l'ouverture des données publiques (dont Danièle Bourcier, directrice de recherche au CNRS, Christian Quest, le fondateur de Opendatarchives et Bertrand Gervais, cofondateur d'Handimap) appellent à accélérer l'ouverture des données publiques. « Malgré la volonté politique démontrée par la France sur ce terrain depuis plusieurs années, des interrogations se sont récemment fait jour à propos des contraintes opérationnelles mais aussi, de manière plus inquiétante, de la portée même de l'Open Data. Même si certaines de ces interrogations peuvent être légitimes, ce mouvement de repli fait craindre un ralentissement dans la mise en oeuvre de l'ouverture dans certains secteurs, qui pourrait à terme limiter les bienfaits de l'Open Data, au détriment des citoyens».
La Cour des Comptes avait appelé le gouvernement à clarifier la doctrine de l’Etat en matière de données mais aussi des conditions d’application des règles relatives à l’ouverture des données. Dans un courrier au Premier Président de la Cour des Comptes, le Premier ministre a annoncé, le 4 mars, que la gratuité de la réutilisation des données serait généralisée, au plus tard en 202. « La décision de gratuité, complète à horizon 2022, permettra de simplifier de manière efficace la question de l’utilisation des licences dans la mesure où elle permettra de s’affranchir des doubles licences existantes (payantes ou gratuites avec obligation de repartage) facilitant ainsi le passage à la licence ouverte. Il ne devra alors être recouru à des licences spécifiques, qui restreignent les possibilités de réutilisation des données, qu’à titre très exceptionnel et dûment justifié ».
Références :
Vers un médiation numérique autour des données
Pour Dominique Cardon, « libérer les données ne suffit pas. Il faut aussi accompagner leurs réutilisateurs, faire de la « curation » de données, expliquer les conditions d’enregistrement et les catégories de classement. La plateforme d’Etalab y contribue : en offrant aux associations et aux entreprises la possibilité de déposer elles aussi des bases de données à côté des données administratives, elle crée un espace de dialogue et d’animation de la communauté des réutilisateurs ».
C'est tout l'enjeu de démarches de médiation numérique des données, comme celle des Infolabs.