Qu'est-ce que les sciences participatives ?
Les sciences participatives se déclinent au pluriel. La grande diversité de disciplines, de sujets, d’acteurs, de méthodes et de finalités impose d’adopter une définition large : « les sciences participatives sont définies comme les formes de production de connaissances scientifiques auxquelles des acteurs non-scientifiques-professionnels, qu’il s’agisse d’individus ou de groupes, participent de façon active et délibérée ».
Référence :
L'essor des sciences participatives
On observe, depuis dix ans, un essor des sciences participatives. Porté par une demande croissante de connaissances sur l’état de la biodiversité, cet engouement pour les sciences participatives doit beaucoup à une nouvelle génération d’outils numériques (applications mobiles et portails) qui transforment les pratiques d’observation de la faune et de la flore pour le grand public comme pour les professionnels.
Dans la majorité des programmes de sciences participatives, une application guide pas à pas la collecte de données (comptages, photographies, mesures), aide à l’identification, localise et collecte directement les données auxquelles accèdent les chercheurs. Ces micro-tâches sont accessibles au plus grand nombre, et les données rendues valables grâce à la compilation d’un très grand nombre d’observations.
Dans le monde anglo-saxon, les sciences de la nature, se sont ouvertes depuis longtemps, aux démarches dites de « science participative ». En France, c’est dans les années quatre-vingt que des programmes de science participative ont vu le jour, comme le programme STOC (qui permet à des ornithologues volontaires de participer au suivi standardisé des populations nicheuses d’oiseaux communs) ou le programme Vigie-Nature, animé par le Muséum national d’Histoire naturelle.
En 2021, 121 471 citoyens ont contribué à un programme de sciences participatives en biodiversité en France.
La Stratégie nationale de Biodiversité 2011-2020 a ainsi fait de la mobilisation et de l’initiative citoyenne un objectif stratégique. L’Office français de la biodiversité (OFB), devenu le bras armé de ces politiques, inclut même le nombre de participants à ces programmes d’observation parmi ses indicateurs de transition écologique.
Au-delà des sciences de la nature, de nombreuses initiatives voient dans des disciplines aussi diverses que l’archéologie, l’astronomie ou l'épidémiologie.
Références :
En 2021, 121 471 citoyens ont contribué à un programme de sciences participatives en biodiversité en France
L'indicateur produit chaque année par le Collectif national sciences participatives biodiversité présente le nombre de participants actifs à des programmes de sciences participatives (qui a fourni au moins une donnée) au cours de l’année permet d'avoir une idée (non exhaustive) de l’activité citoyenne autour des programmes de sciences participatives liés à la biodiversité.
La participation en 2021 est en légère baisse par rapport à 2020 (140 000), année de confinement qui avait connu une croissance très forte du nombre d'observateurs. Pendant le confinement, par exemple, 22 000 personnes avaient participé à l’observation de plus d’un million et demi d’oiseaux.
Référence :
Pluralité des formes et figures d’engagement dans les sciences participatives
Dans une étude consacrée à la participation citoyenne dans les sciences participatives , Florence Millerand, enseignante-chercheuse à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) observe une « pluralité des formes et figures d’engagement. « Une première porte d’entrée pour accéder à ces figures d’engagement consiste à dégager celles présentes dans les discours et dénominations utilisées pour qualifier les acteurs : non-professionnels, non-scientifiques, profanes, grand public, citoyens, bénévoles, amateurs, etc. (…) À chacune de ces figures correspond un ethos entendu au sens d’une façon de penser les relations entre science et société, ici principalement du point de vue de la sphère scientifique ». Elle distingue ainsi six figures :
- Le bénévole « dont le ressort de l’engagement est le don. L’engagement vise, à travers l’acte de contribution, à donner (ou redonner) à un projet, une institution, y compris la science, ou à la société plus généralement ».
- Le passionné « qui se distingue par un attachement souvent profond, soit à l’objet au cœur de son implication, que ce soit les plantes ou les cellules souches, soit à l’activité ou la tâche en elle-même ».
- Le conscientisé « qui, à la différence du bénévole, est motivé par la cause sociale ou politique à laquelle contribuent son engagement, la biodiversité ou la lutte contre le cancer par exemple. L’engagement est directement lié à l’expression d’une conscience et à sa mise en action.
- L’amateur de science, « dont le moteur de l’engagement réside dans la production de savoirs et de connaissances. Cette figure, qui correspond à la figure emblématique, parfois fantasmée, du participant aux projets de science participative (incarnée dans l’expression « citoyen scientifique »), renvoie à une personne animée essentiellement par le désir de participer au développement de la connaissance scientifique ».
- L’amateur du dispositif, « attaché avant tout au dispositif sociotechnique qui peut renvoyer à la fois à une dimension technique (la manipulation d’un matériel) ou humaine (le collectif des engagés) ».
- L’amateur expert ou professionnel, « dont le ressort de l’engagement est l’expertise et sa reconnaissance (…) À la différence de l’amateur de science dont l’identité de « connaissant » est définie directement en lien avec un domaine scientifique, la reconnaissance de l’expertise est dirigée ici vers la construction de son identité personnelle d’expert».
« Ces figures multiples mettent en lumière des différences importantes dans les formes d’expertise et la manière dont elles sont distribuées entre les acteurs. En l’occurrence, ces figures traduisent des relations particulières à la connaissance où s’expriment différentes visions des rapports entre science et société ».
Référence :
Mosaic, un centre de compétences en science participative
Le Museum d’histoire naturelle et Sorbonne Université ont associé leurs expertises dans le cadre de l’unité scientifique, Mosaic. (« Méthodes et outils pour les sciences participatives ») pour accompagner les chercheurs : de l’incubation jusqu’à la livraison d’une plateforme numérique participative. Mosaic est constituée d’une équipe d’experts : chercheurs, développeurs informatiques, experts en sciences participatives.
Référence :
Un outil en ligne de formation aux Sciences Participatives
Le Museum national d’Histoire naturelle, l’UMS Mosaïc et l’Union nationale des Centres permanents d'initiatives pour l'environnement (CPIE) ont conçu un outil en ligne pour se former aux compétences nécessaires aux porteurs de programme de sciences participatives, organisé autour de six modules :
- Connaître le paysage des sciences participatives en biodiversité
- Créer votre programme de sciences participatives en biodiversité
- Animer votre programme de sciences participatives en biodiversité
- Recueillir les données et les rendre utilisables et utiles
- Evaluer votre programme
- Pérenniser votre programme avec un modèle socio-économique adapté
Référence :
Épidémiologie participative : quand le public participe à la surveillance et à la compréhension du Covid-19
« Dès mars-avril 2020, face aux limites des données recueillies par les services d’urgence et les hôpitaux, l’idée s’impose un peu partout de s’appuyer sur le public pour compléter la connaissance de l’épidémie. En quelques semaines, une floraison de questionnaires en ligne et d’enquêtes voit le jour pour identifier les symptômes et enrichir le tableau clinique, dénombrer les cas, cartographier la propagation, et pour comprendre les mécanismes de transmission ». Dans un dossier consacré aux diverses formes de participation du public aux enquêtes épidémiologiques, Maurice Ronai et Sophie Pène reviennent sur plusieurs réalisations significatives.
Au Royaume-Uni, l’application mobile Covid Symptom Study proposait aux volontaires des questionnaires quotidiens les invitant à décrire leur état de santé. Fin mars 2020, les données quotidiennes de l’état de santé de 2 400 000 répondants montrent que parmi les symptômes fréquents (courbatures, frissons, fatigue, maux de tête et diarrhées, perte de l’odorat et du goût), ce dernier symptôme est trois fois plus élevé chez les personnes testées positives. Les chercheurs peuvent ainsi déterminer la perte d’odorat et de goût comme un très bon prédicteur d’infection. Téléchargée par quatre millions, de personnes, avec jusqu’à 850 000 contributeurs quotidiens, enregistrant plus de 480 millions de rapports sur la santé, Covid Symptom Study a donné lieu à 50 articles scientifiques dans des revues à comité de lecture.
Aux États-Unis, le projet Covid Near You a permis en mars 2020 à plus de 444 000 personnes aux États-Unis de transmettre leurs symptômes. Le signalement était rapide, simple et anonyme, avec une simple question d’introduction : « Comment vous sentez-vous ? » En août 2020, la plateforme avait recueilli plus d’un million de rapports, fourni des informations sur la symptomatologie du Covid et les principaux facteurs de risque démographique).
Référence :
Rencontres nationales "Sciences Participatives" les 12-13 octobre 2023 à Marseille
Organisées conjointement pour la première fois par le Collectif national Sciences participatives - Biodiversité et le Collectif Vigie Mer, les Rencontres nationales Sciences Participatives seront articulées autour d'une thématique transversale : « Comment améliorer le lien recherche/société civile/citoyens à travers les sciences participatives pour la transition écologique et la mer de demain ? »
La première journée sera consacrée à des ateliers exploratoires, de témoignages, de retours d'expérience et de co-construction, et la deuxième à un forum ouvert.
Ces journées de partage sont à destination des professionnels concernés par les sciences participatives : acteurs de la vie maritime, acteurs de la biodiversité, scientifiques, gestionnaires, porteurs de programmes, éducateurs, enseignants, etc.
Référence :
Sources
2. Les sciences participatives : l’avènement des citoyens chercheurs
3. Les sciences participatives révolutionnent le suivi de la biodiversité
4. Évolution de l'implication des citoyens dans les sciences participatives liées à la biodiversité
5. La participation citoyenne dans les sciences participatives : formes et figures d’engagement
6. MOSAIC Méthodes et outils pour les sciences participatives
9. Rencontres nationales Sciences Participatives les 12-13 octobre 2023, à Marseille