Dans le cadre de l’épidémie de Covid-19, le télétravail n’est plus obligatoire depuis début février : 24 % des salarié.e.s continuent toutefois de télétravailler au moins un jour par semaine en février 2022.Alors qu’une très faible minorité de salarié.e.s avaient recours au télétravail avant la crise sanitaire, ce dernier a concerné près d’un salarié sur quatre lors du premier confinement, un sur cinq lors du deuxième et jusqu’en juin 2021. Le télétravail avait alors deux buts : freiner la diffusion de l’épidémie en réduisant la mobilité et les contacts, d’une part, et préserver l’activité des entreprises et des administrations, de l’autre.Plusieurs études publiées début 2022, abordées ci-dessous dans le présent dossier, tirent les enseignements de cette expérimentation, à grande échelle, du travail à distance :
L’Insee dresse un bilan du recours au télétravail sur l’année 2021 et dresse une typologie des télétravailleur.euse.s ;
La Dares (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques) du Ministère du travail et de l’emploi s’attache à décrire les conséquences concrètes de la crise sanitaire sur les conditions de travail et les risques psychosociaux des actifs ;
L’APEC (Association pour l’emploi des cadres) et l’ANACT (Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail) pour leur part, ont entrepris de cerner l’impact du télétravail sur les pratiques managériales.
Selon l’APEC et l’ANACT, « la modalité de travail "mixte" (à distance et en présentiel) semble s'installer dans la durée. Cette forme de travail hybride invite à repenser les différentes dimensions du management : les coopérations entre salariés, le partage des taches, les formats des réunions et des échanges informels... avec des enjeux de performance et de santé au travail mais aussi de cohésion interne et d'équité ».S’appuyant sur une table ronde réunissant plusieurs experts au Sénat, la délégation à la prospective du Sénat a identifié huit questions sur l’avenir du télétravail. Elle assortit ses réponses d’une série de recommandations (à retrouver plus loin dans ce dossier).
En 2021, 22 % des salarié.e.s ont télétravaillé chaque semaine en moyenneEn 2021, en moyenne chaque semaine, 22 % des salariés ayant travaillé au moins une heure au cours de la semaine ont recouru au télétravail, selon l’Insee. Parmi les salarié.e.s qui ont télétravaillé, 44 % l’étaient toute la semaine et 56 % une partie de la semaine seulement. Au total, 15 % des jours travaillés par l’ensemble des salarié.e.s en 2021 l’ont été en télétravail.La part des salarié.e.s ayant télétravaillé diminue nettement à partir de juin 2021, pour rebondir à nouveau en décembre.La majorité des télétravailleur.euse.s sont des cadresEn 2021, en moyenne chaque semaine, 55 % des cadres ont télétravaillé, alors que ce n’était le cas que de 22 % des professions intermédiaires et de 17 % des employé.e.s qualifié.e.s. « Le télétravail était quasi inexistant tout au long de l’année chez les employés peu qualifiés ou les ouvriers, ce qui traduit le fait qu’ils occupent en très grande majorité des professions pour lesquelles le télétravail n’est pas pratiqué. Les cadres représentent ainsi 60 % des télétravailleurs, contre seulement 22 % de l’ensemble des salariés ayant travaillé au moins une heure au cours de la semaine ».En outre, le télétravail sur la totalité de la semaine est plus fréquent chez les cadres : en 2021, il a concerné 47 % des cadres ayant télétravaillé, contre 40 % des autres salarié.e.s ayant télétravaillé. « Parmi les cadres, le fait d’encadrer des salarié.e.s réduit toutefois le télétravail : 49 % des cadres dont la supervision est la tâche principale ont télétravaillé en moyenne chaque semaine de 2021, contre 58 % des autres ».Moins de télétravail pour les jeunes ou les salarié.e.s des petites entreprisesLe télétravail est moins fréquent qu’en moyenne pour les jeunes (17 % en 2021 pour les moins de 30 ans), les salarié.e.s à temps partiel (12 %) ou encore ceux et celles en emploi à durée limitée (3 % en intérim et 13 % en CDD).Certaines de ces caractéristiques sont liées : les cadres sont en effet plus nombreux dans les grandes entreprises et parmi les salarié.e.s les plus âgé.e.s.
Quatre catégories de télétravailleur.euse.s, selon l'Insee
L’Insee distingue quatre groupes de professions de salariés relativement à leur recours et intensité de télétravail en 2021 :
47% des salarié.e.s exercent une profession pour laquelle le télétravail a été quasi inexistant au cours de l’année 2021, même en période de pic de la crise sanitaire. Il s’agit très majoritairement d’ouvriers et d’employés (86 %) et plus généralement de salariés exerçant des métiers dans la santé ou l’action sociale, le commerce ou l’hébergement-restauration.
26 % des salarié.e.s exercent une profession avec un recours médian au télétravail en 2021. Ces professions sont plus fréquemment qu’en moyenne occupées par des femmes, des professions intermédiaires ou des employés qualifiés, ou encore des fonctionnaires : employés de l’accueil, du secrétariat et de la comptabilité, employés administratifs de la fonction publique, etc.
18 % des salarié.e.s exercent une profession pour laquelle le télétravail a été fréquent en 2021, concernant plus d’un.e salarié.e sur deux en moyenne sur l’année (52 %) mais ayant atteint 62 % à son pic en avril. Les salarié.e.s de ce groupe sont fréquemment des cadres occupant des fonctions de supervision, des ingénieurs informatiques, des cadres financiers ou encore des journalistes.
6 % occupent une profession pour laquelle le télétravail a été intensif en 2021. Ces professions concernent exclusivement des cadres, occupant moins fréquemment des positions d’encadrant : ingénieurs informatiques, cadres financiers, journalistes, enseignant.e.s-chercheur.euse.s dans l’enseignement supérieur par exemple. Plus des trois quarts (77 %) des salarié.e.s de ce groupe ont télétravaillé en moyenne chaque semaine en 2021 et 59 % des jours travaillés au sein de ces professions l’ont été en télétravail.
Impacts sur la santé et le travail : un vécu du travail contrasté selon les personnesDans une note publiée en février 2022, la Dares (Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques) du Ministère du travail et de l’emploi fait le point sur les pratiques du télétravail et ses impacts sur la santé. Elle s’appuie sur l’enquête TraCov, réalisée début 2021, qui visait principalement à décrire les conséquences concrètes de la crise sanitaire sur les conditions de travail et les risques psychosociaux des actifs.L'enquête Tracov portait sur un échantillon de 50 000 individus en emploi pendant la crise sanitaire, âgés de 20 à 62 ans en 2020, avec 19 953 répondants, soit un taux de réponse de 40 %.Selon cette enquête, sept télétravailleur.euse.s sur dix en avaient début 2021 une pratique régulière : d’un à cinq jours par semaine.La Dares distingue ainsi trois groupes de salarié.e.s télétravailleur.euse.s.
Les « exclusifs » : 25 % des télétravailleur.euse.s le pratiquaient en grande majorité cinq jours sur cinq et suivaient leurs réunions par visioconférence. Ce groupe estime avoir des moyens suffisants au quotidien pour travailler à distance. C’est le seul groupe où une forte proportion des salarié.e.s avait une expérience antérieure du télétravail.
Les « intensifs » : 30 % des télétravailleur.euse.s le pratiquaient de manière régulière, entre un à quatre jours par semaine en janvier 2021. Durant l’année 2020, ce groupe a connu de longues périodes de télétravail exclusif ou de télétravail hybride, alternant travail sur site et à distance. Ils/elles avaient parfois une expérience antérieure du télétravail et bénéficiaient souvent d’une prise en charge des moyens matériels du télétravail (équipement informatique, etc.) de la part de leur employeur.
Les « vulnérables » : 17 % des télétravailleur.euse.s télétravaillaient eux/elles aussi majoritairement entre un et quatre jours par semaine en janvier 2021 : ce groupe se distingue des précédents par des difficultés importantes dans leur travail (problèmes de connexion, d’applications numériques, de matériel). « Depuis le début de la crise sanitaire, ils n’ont eu qu’une pratique hybride du télétravail et pour de courtes durées. N’ayant que très peu d’expérience du télétravail avant la crise, ils découvrent de nouveaux outils numériques et voient augmenter leurs temps d’utilisation de l’informatique ». Près de la moitié d’entre eux/elles travaillent au sein de l’administration publique, en particulier en qualité de cadres et de professions intermédiaires. Leur groupe est le plus féminisé.
Horaires décalées et des durées de travail allongéesSi le télétravail accroît l’autonomie, il aboutit aussi à des horaires décalées et des durées de travail allongées. « Le télétravail est associé à davantage de douleurs et de troubles du sommeil. Son vécu est contrasté selon les personnes. Pour les télétravailleurs qui ne disposent que de moyens matériels peu adaptés, voire inexistants, pour le travail à distance, le soutien social se détériore ainsi que les autres risques psychosociaux et les troubles de la santé. Pour les femmes et les agents de la fonction publique, le télétravail occasionne davantage de difficultés que pour les salariés du secteur privé ».Une intensité du travail, des exigences émotionnelles et une conciliation plus dégradées pour les femmesEn moyenne, les télétravailleuses connaissaient une plus forte dégradation de l’intensité du travail que leurs homologues masculins, qu’elles soient en télétravail régulier ou non. Par rapport à l’avant crise, elles sont plus nombreuses à subir une augmentation de la pression au travail, devoir penser à trop de choses à la fois, ou encore, recevoir des ordres contradictoires.Les télétravailleuses signalent davantage que les télétravailleurs la dégradation des exigences émotionnelles : elles ressentent davantage une hausse des tensions au travail et sont plus souvent bouleversées dans leur travail.Des difficultés accrues pour les agents de la fonction publique Même au sein de groupes homogènes en matière de pratique du télétravail, les conditions de travail évoluent différemment pour les agents de la fonction publique et les salarié.e.s du privé.Comparativement au secteur privé, le télétravail dans le public s’accompagne d’une plus forte dégradation des conditions de travail selon plusieurs dimensions : les conflits de valeur, les difficultés de conciliation entre vie privée et professionnelle, les exigences émotionnelles, la durée et l’intensité du travail.
Huit télétravailleur.euse.s sur dix souhaitent continuer le télétravail, en réduisant cependant son intensitéSelon l’enquête Tracov de la Dares, sept télétravailleur.euse.s sur dix souhaiteraient poursuivre cette pratique au moins une fois par semaine, et un sur dix tous les jours de la semaine.La fréquence privilégiée est d’un ou deux jours par semaine. 13 % pourraient continuer mais ne le souhaitent pas, et 7 % ne souhaitent pas télétravailler, jugeant leurs tâches incompatibles avec le télétravail.Globalement, plus ils ont une pratique intensive du télétravail, plus les salarié.e.s souhaitent la poursuivre, avec une intensité toutefois moindre. Ceux qui sont en télétravail toute la semaine souhaitent majoritairement le poursuivre au moins trois jours par semaine, tandis que ceux qui le pratiquent surtout entre un et quatre jours préfèrent passer à un ou deux jours hebdomadaires.Près de la moitié des salarié.e.s en télétravail occasionnel souhaitent poursuivre le télétravail de façon régulière (48 %), alors que seul un tiers de ceux qui ne l’ont pratiqué qu’en 2020 l’envisagent.Ces derniers ont davantage subi le télétravail durant la crise sanitaire, soit en l’ayant pratiqué sans le souhaiter à l’avenir, soit alors même que leurs tâches n’étaient pas compatibles avec le télétravail.Les conclusions de l'enquête Tracov rejoignent celles du Baromètre Télétravail et Organisations hybrides du groupe de protection sociale paritaire et mutualiste Malakoff Humanis que près de la moitié des salarié.e.s déclare vouloir travailler en mode hybride. La proportion de salariés qui font le choix du télétravail serait ainsi passée en un an de 59% à 68 %.
Selon 27 % des entreprises interrogées par la Dares en février 2022, la majorité des salarié.e.s aspirent à télétravailler davantage.
« Le télétravail ne semble pas encore avoir acquis le statut de modalité de travail à part entière aux yeux des entreprises »L'APEC (Association pour l'emploi des cadres) et l'ANACT (Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail) pour leur part, ont entrepris de cerner l’impact du télétravail sur les pratiques managériales.« L’ampleur prise par le télétravail au plus fort de la crise sanitaire ne doit pas laisser penser qu’une majorité d’entreprises ont définitivement adopté ce mode d’organisation».En septembre 2021, moins de 4 entreprises sur 10 permettaient à leurs salarié.e.s de télétravailler (38 %), dont 25 % de façon régulière. Cette possibilité varie selon le secteur d’activité : beaucoup plus fréquente dans les services à forte valeur ajoutée (64 %), là où la proportion de cadres est la plus importante et donc la plus éligible au télétravail comme les activités informatiques, la banque assurance ou le conseil, que dans l’industrie (31 %), le commerce (21 %) ou la construction (20 %). Mais cela varie aussi selon la taille de l’entreprise.« Pour certaines entreprises, souvent caractérisées par une faible proportion de cadres et de métiers éligibles au télétravail, les modes d’organisation mis en œuvre pour permettre la continuité de l’activité n’auront donc été qu’une expérimentation sans lendemain ».Le télétravail est encore peu encadré : une grande diversité de situations dans sa mise en œuvreSi le nombre d’accords d’entreprise consacrés au télétravail a progressé de 67 % entre 2019 et 2020, le télétravail ne constitue pas un thème de la négociation annuelle obligatoire.Les deux tiers des ETI et des grandes entreprises déclarent encadrer le télétravail de leurs salarié.e.s par le biais de règles ou de procédures. Cette formalisation des modalités de travail à distance est également courante dans les PME (54 %), mais elle est beaucoup moins répandue dans les TPE (36 %).« Dans certains cas, les entreprises préfèrent ne pas s’engager par écrit sur les conditions du recours au télétravail ou sur les critères d’éligibilité de façon à préserver leurs marges de manœuvre ultérieures ».Les entreprises se sont adaptées au télétravail sans y voir l’émergence d’un nouveau paradigme nécessitant une refonte de la gestion des ressources humainesLà où une majorité d’entreprises estiment que le télétravail a fait évoluer la façon de fonctionner des équipes (53 %), dans les TPE-PME, comme dans les plus grandes structures, elles sont beaucoup plus rares à l’imaginer transformer la gestion des ressources humaines.A peine plus d’1/3 des entreprises considèrent ainsi que le télétravail soulève de nouveaux défis en matière de relations sociales (38 %) et de pilotage du temps de travail (36 %).Elles sont encore moins nombreuses à voir dans la progression du travail à distance un facteur d’évolution concernant le développement des compétences (29 %) ou le recrutement (23 %).« En dépit de son expérimentation à grande échelle, le télétravail ne semble pas encore avoir acquis le statut de modalité de travail à part entière aux yeux des entreprises ou tout du moins de la majorité d’entre elles. Il reste souvent perçu comme un avantage ou une variable d’ajustement. Les entreprises ne l’appréhendent donc pas, dans la plupart des cas, comme un facteur de changement supposant de rompre avec leur cadre de référence antérieur pour penser l’avenir du travail. »« Rares sont aujourd’hui les entreprises à penser le télétravail en termes de compétences et à proposer des formations au management à distance », observent les auteurs de l'étude, « le télétravail ne semble pas encore avoir acquis le statut de modalité de travail à part entière aux yeux des entreprises ».
Les entreprises bretonnes ayant réalisé du télétravail semblent s’être vite adaptées aux outils de travail à distance65% des entreprises bretonnes ont dû mettre en place du télétravail lors du premier ou du second confinement de 2020, selon une enquête réalisée au printemps 2021 par le Groupement d'intérêt Scientifique Marsouin.Pour plus des deux tiers des entreprises, le développement du télétravail est limité par la nature des activités de l’entreprise, qui ne peuvent pas s’effectuer à distance.Les problèmes liés au matériel et à l’équipement (15%) ne sont pas beaucoup mis en avant. D’après l’enquête, les effets psychosociologiques (démotivation, désocialisation, déshumanisation, etc.) liés à la distance et les problèmes organisationnels seraient les principaux freins à la mise en place du télétravail plutôt que des problèmes matériels.Les entreprises ayant réalisé du télétravail semblent s’être vite adaptées aux outils de travail à distance si elles ne les utilisaient pas déjà avant. Elles sont ainsi 84% à utiliser des espaces de travail partagés, et 78% des outils de visioconférence.La première limite citée par les entreprises par rapport au télétravail est la motivation des salarié.e.s à distance et les risques psycho-sociaux que cela pourrait impliquer. Plus d’une entreprise sur trois ayant fait du télétravail durant l’un des confinements a mis en place une charte sur le droit à la déconnexion de ses salarié.e.s.Plus du tiers des entreprises qui ont dû mettre en place du télétravail au premier ou au deuxième confinement estiment que la perception du télétravail a changé « en bien » que ce soit pour les managers (36%) ou pour les salarié.e.s (38%).L’enquête Entreprises 2021 est soutenue par la Région Bretagne. Cela a permis d’interroger 11 400 entreprises bretonnes et de collecter les réponses de 1 529 d’entre elles. Cette enquête a été passée auprès des entreprises de 10 salarié.e.s et plus entre le 15 mars et le 8 avril 2021.
Un tiers des emplois seraient « télétravaillables »Si le travail à distance est rendu possible par la technologie, il est loin de pouvoir concerner la totalité des emplois.Selon l’économiste Gilbert Cette, auditionné par la délégation à la prospective du Sénat, « la littérature économique est cependant assez consensuelle quant au fait qu'en France comme dans les autres pays avancés, la proportion de postes télétravaillables serait d'un tiers, sinon plus. Ce chiffrage semble très prudent ».Dans une note de mars 2021, l'Institut Sapiens chiffrait pour la France à 27 % la part des actifs d'ores et déjà éligibles au télétravail : 6,9 millions d'actifs pourraient télétravailler sans aménagement de leur poste de travail. S'y ajoutent 2,5 millions d'actifs supplémentaires qui pourraient télétravailler à condition d'aménager leur poste, leurs horaires et leurs tâches, portant le potentiel de télétravail à 36 % des actifs. Il resterait cependant 17,5 millions d'actifs ne pouvant pas télétravailler soit tout de même près des deux-tiers de l'emploi en France.Ces chiffres sont très proches de ceux livrés dans une étude de 2017 de la Fondation Concorde, qui estimait que 60 % des salarié.e.s seraient dans l'incapacité de télétravaillerSelon le European Data Lab, 37,8 % des emplois pourraient être exercés en France en télétravail, un chiffre légèrement supérieur à la moyenne européenne.Une étude du National Bureau of Economic Research estimait que 37 % des emplois pouvaient être exercés totalement en télétravail aux États-Unis. Cette étude, sur la base de comparaisons internationales, estimait que plus un pays était développé, plus la part des emplois télétravaillables était importante.
Sénat : l’avenir du télétravail en huit questionsS’appuyant sur une table ronde réunissant plusieurs experts au Sénat, la délégation à la prospective du Sénat a identifié huit questions sur l’avenir du télétravail. Elle assortit ses réponses d’une série de recommandations.Pourrons-nous être tous télétravailleurs en 2050 ?La réponse est clairement négative pour les trois rapporteurs de la délégation à la prospective : Céline Boulay-Espéronnier, Cécile Cukierman, et Stéphane Sautarel : « une partie encore significative du travail ne peut pas être exercée à distance. Au mieux la moitié des actifs pourraient être concernés par le télétravail en France. En outre, nous ne télétravaillerons pas tout le temps et alternerons probablement présentiel et distanciel ».La croissance économique sera-t-elle stimulée par le télétravail ? « Les perspectives de gains de productivité ne sont pas garanties mais elles sont probables dès lors que le télétravail sera bien organisé au sein des entreprises et des administrations ».Les sénateurs recommandent ici la mise en place d’un observatoire du télétravail pour « analyser les bonnes pratiques, mais aussi les cas d’échecs » et « construire pas à pas un référentiel qui serait utile à tous ».Le télétravail peut-il conduire à de nouvelles délocalisations ?Les rapporteurs ne pensent pas que le télétravail puisse conduire à de nouvelles délocalisations. « Le télétravail ne change pas forcément la donne, d’autant que les emplois les plus télétravaillables sont les plus qualifiés, sur lesquels il existe plutôt une pénurie mondiale. Le vrai risque est celui d’une délocalisation des télétravailleurs, qui, « pour des raisons fiscales ou tout simplement de préférence personnelle, pourraient accroître leur mobilité au détriment de leur présence en France ». Les sénateurs recommandent néanmoins de veiller à préserver l’attractivité résidentielle de la France « pour faire de notre pays une terre d’accueil plutôt que d’exil des télétravailleurs ».Le télétravail peut-il constituer une avancée sociale ?S’il fait apparaître des risques nouveaux qu’il convient de gérer, préviennent les parlementaires, le télétravail, choisi et négocié, élargit l’éventail des possibilités offertes aux salarié.e.s . Il pourrait même devenir un des critères d’appréciation de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE), « afin d’inciter à la recherche du bien-être social des télétravailleurs », avancent-ils.Le télétravail peut-il avoir un impact majeur sur nos lieux de vie et nos mobilités ?S'il est encore trop tôt pour proclamer la revanche des campagnes et la fin des embouteillages, un mouvement de relocalisation peut s’enclencher et prospérer dans les années à venir, notamment au profit d’une ruralité gagnante, prédit le rapport. Pour préparer cette mutation, ses auteurs jugent utile d’anticiper l’arrivée de nouveaux télétravailleurs dans les territoires à travers divers investissements : tiers-lieux, installation de la fibre, maintien de services publics locaux, infrastructures de loisirs et lieux de sociabilité, aide à la construction de logements adaptés. Dans les grandes agglomérations, il conviendrait d’encourager la requalification des surfaces de bureaux en logements ou de les rendre plus modulaires. Parallèlement, il est essentiel d’anticiper les nouvelles manières de se déplacer, en réorganisant l’offre de transports collectifs et en accélérant le passage de la propriété des véhicules à l’usage partagé, prône le rapport d’information.Le télétravail peut-il améliorer notre environnement ?« Le télétravail, en réduisant les déplacements, contribue à la transition vers la décarbonation de nos économies. Mais il rend encore plus indispensable la maîtrise de notre empreinte numérique ». Il conviendrait, selon les rapporteurs, « d’encourager dès maintenant la réutilisation et le partage des objets numériques pour éviter le suréquipement des entreprises et des ménages ».Le télétravail nous rend-il trop dépendants des outils informatiques ?« Nous avons besoin d’un outillage informatique performant pour réussir l’expérience du télétravail. Des télétravailleurs mieux équipés et mieux formés seront plus à même de faire face aux nouveaux risques numériques qui devront être maîtrisés. Il conviendrait d’achever le déploiement des infrastructures numériques comme la fibre sur tous les territoires, pour ne pas créer des zones blanches de télétravail, mais aussi davantage former aux métiers de la cybersécurité et encourager des data center localisés sur le territoire national, pour sécuriser les données ».Le télétravail constitue-t-il une perspective universelle ?« Nous disposons d’instruments de plus en plus puissants permettant de travailler, d’étudier, d’échanger à distance. Télétravailler va dans le sens de l’histoire. Pour autant, l’être humain est un animal social qui a besoin d’échanges directs, qui se noueront peut-être moins au travail et devront donc trouver de nouveaux cadres ». Il appartient aux organisations de « transformer les modes de management pour les faire reposer davantage sur la confiance. Un effort de formation de l’encadrement, notamment de l’encadrement intermédiaire sera nécessaire ».