La tendance, dans le secteur public comme dans les secteur privé est à la dématérialisation de la relation client -usager.
Dans le rapport qu'il avait consacré en 2013 à l'inclusion numérique, le Conseil National du Numérique observait que "beaucoup d'acteurs de terrain décrivent l'effet excluant d'une politique d'e‐administration qui supprime des interfaces humaines au profit d'accès web dans lesquels les plus fragiles ne retrouvent que rarement les chemins adaptés à leur situation réelle : dans ces cas limites malheureusement fréquents, le numérique exclut non seulement de ses propres bénéfices mais de l'accès aux droits".
37 % des Français ont réalisé une démarche administrative en ligne au cours des 12 derniers mois
Le secrétariat général pour la modernisation de l’action publique (SGMAP) vient de publier la 3e édition du tableau de bord des services publics numériques.Ce tableau de bord permet de suivre, année après année, la perception qu’ont les Français des démarches administratives dématérialisées, et l’évolution de leur taux d’utilisation par rapport aux autres canaux.
Parmi les particuliers déclarant avoir réalisé une démarche administrative au cours des 12 derniers mois (37 % de l’échantillon interrogé), 3 sur 4 déclarent l’avoir effectuée en ligne. 90 % sont satisfaits de la démarche effectuée en ligne. Ces deux indicateurs sont en hausse par rapport à 2015.
- Au cours des 12 derniers mois, 37 % des Français réalisé une démarche administrative auprès d’une administration publique
- 47 % déclarent avoir consulté un compte en ligne du type CAF, impôts, assurance maladie, pôle emploi dans les 12 derniers mois
- 28 % déclarent avoir réalisé entièrement une démarche sur un site internet de l’administration
- 32 % considèrent que les démarches administratives en ligne facilitent leurs relations avec l’administration, 17 % les jugent plus compliquées et 46 % ni plus faciles ni plus compliquées.
Des inégalités perdurent face aux services publics dématérialisés
D’après la dernière édition du Baromètre du Numérique, l’utilisation d’Internet pour les démarches administratives et fiscales avait enregistré une nette progression, passant de 53% d’adoption par les français en 2015 à 62% en 2016.Le sentiment de facilité domine dans tous les groupes d’utilisateurs, avec quelques nuances cependant. En effet, des freins structurels perdurent. La fracture entre non-diplômés et diplômés du supérieur est la plus forte, avec un rapport du quitte au double. 16% des personnes non connectées avancent un problème de coût.
Il est ainsi nécessaire de prendre garde à ne pas voir émerger de nouvelles fractures territoriales : si 30% des parisiens sont inquiets à l’idée de devoir effectuer leurs démarches en ligne, 43% des français résidant en zones rurales le sont.
L’inquiétude n’est pas uniquement fonction de variables économiques et géographiques. 21% des 18-24 ans se déclarent assez inquiets à l’idée de devoir accomplir la plupart de leurs démarches administratives et fiscales sur internet. C’est plus que les 25-39 ans (16%) et autant que les 40-59 ans ! 19% des 18-24 disent ainsi avoir un problème d’aisance avec l’ordinateur et 31% un problème avec la sécurité des données (classe d’âge qui accorde le plus d’importance à cette question).
Les deux motifs principaux d’inquiétude relèvent des usages : 31% sur le manque d’aisance avec ordinateur, 27% sur la sécurisation des données personnelles. Quant aux français non-connectés, 54% déclarent ne pas être intéressés par un accès à Internet.
Source : Agence du Numérique: des inégalités perdurent face aux services publics dématérialisés
Difficultés croissantes pour obtenir des informations par téléphone auprès des services publics.
Selon une enquête publiée en septembre 2016 dans le magazine "60 millions de consommateurs", il est de plus en plus difficile à obtenir des informations par téléphone auprès des services publics. Les usagers notamment de la Caf, la Sécurité sociale et Pôle emploi sont souvent invités à passer par internet.60 Millions de consommateurs a réalisé un test qui consistait à faire appeler des caisses d’allocations familiales (CAF), des caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) et des agences de Pôle emploi par des « usagers mystères » cherchant à connaître les conditions d’obtention d’une aide financière précise à laquelle ils pouvaient prétendre.
1 463 appels téléphoniques ont ainsi été passés dans toute la France par quatre profils d’usagers : une personne malentendante, une autre avec un fort accent africain, une troisième n’ayant pas d’accès Internet chez elle, et un usager ordinaire.
Les résultats de l’enquête montrent qu’il est bien difficile et aléatoire, par téléphone, de connaître ses droits, les démarches à effectuer, les pièces à prévoir, ou même d’obtenir de simples renseignements.
- L’Assurance Maladie (les Caisses primaires d’Assurance Maladie, CPAM), selon cette enquete, interrogée sur l’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS) obtient les meilleursrésultats. 53 % des appelants ont eu des informations précises sur cette allocation. Mais moins d’un tiers a obtenu la liste des démarches à effectuer. Si bien qu’un appelant sur deux estime n’avoir pas reçu de réponse satisfaisante .
- À Pôle emploi, les enquêteurs 60 Millions de consommateurs ont demandé les conditions pour bénéficier de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE). La moitié des appels a permis de les connaître, sans simulation personnalisée toutefois. S’agissant des démarches à effectuer, 40 % des appels ont donné lieu à une information succincte mais, une fois sur cinq, le conseiller a pris le temps de les décrire précisément. Au final, 57 % des usagers estiment n’avoir pas eu de réponse satisfaisante.
- S’agissant des Caisse d'Allocations familiales de Paris, les appels portaient sur l’allocation de logement sociale (ALS) : 70 % des appels n’ont pas permis d’avoir la liste des pièces à joindre au dossier.
Source : 60 Millions de consommateurs : Pas d’Internet, pas d’allocations ?
Les métiers de l’action sociale fortement sollicités pour accompagner les publics défavorisés dans les démarches administratives
Afin de mieux comprendre la place du numérique dans les pratiques professionnelles des intervenants sociaux, l’association Emmaüs Connect a interrogé 93 professionnels de l’Action sociale individuellement ou lors de focus groupe.Il ressort de l’étude, publiée en avril 2016, que le numérique est bien entré dans les métiers de l’Action sociale, même si des écarts subsistent selon les différents champs d’accompagnement investigués (budget, accès aux droits, insertion socio-professionnelle, logement, hébergement d’urgence, et accueil ponctuel).
- 75% des professionnels affirment faire les démarches numériques « à la place de » l’usager
- 95% déclarent que l’accès au numérique se fait très fréquemment par un accompagnement de l’usager.
- 83% des intervenants sociaux interrogés jugent le numérique indispensable dans leur pratique professionnelle, et 58% le jugent indispensable dans le parcours d’un usager.
- Moins de 10% des intervenants sociaux interrogés déclarent ainsi avoir reçu une formation au numérique dans le cadre professionnel ou au cours de leur formation initiale.
- Seuls 30% des intervenants sociaux sont en capacité de diriger un usager ayant des lacunes numériques vers un acteur proposant une formation adaptée.
- Moins de 20% des structures ont une procédure systématique de détection des difficultés numériques des usagers
Source : Emmaus Connect : Le numérique au sein de l’Action sociale dans un contexte de dématérialisation, Politiques d’établissements, pratiques des professionnels et accompagnement au numérique des usagers (Cahier & Connexions solidaires)
Dans le secteur privé également, la substitution d’automates téléphoniques et d’interfaces en ligne contribue pour certains à une simplification de leur vie de consommateur, pour d’autres à l’inintelligibilité des offres et donc à une asymétrie croissante de la relation consommateur/entreprise, à une dégradation globale de la relation client.