Depuis le 1er janvier 2016, les 22 régions métropolitaines françaises ont fusionné pour n’en former plus que 13. La compétence numérique comme les autres va devoir être unifiée à l’échelle des nouvelles régions. Quel impact cette fusion va-t-elle avoir sur les observatoires régionaux du numérique ? Pour prendre la mesure des enjeux de la transition des observatoires, il s’agit d’abord de revenir sur leur histoire et leurs spécificités pour se pencher ensuite sur leur devenir.
De quels Observatoires parle-t-on ?
On dénombre 12 initiatives régionales de mesure des usages numériques en France. Les observatoires numériques régionaux doivent d’abord être distingués par les domaines qu’ils recouvrent : les infrastructures (déploiement du haut-débit), l’économie numérique (cartographie de filière), les usages (particuliers, entreprises, administrations). La Mission Société numérique de l’Agence du Numérique s’intéresse tout particulièrement aux Observatoires des usages numériques des particuliers ; ils seront l’objet de cet article.Il faut néanmoins souligner que l’observation de l’évolution des usages numériques n’est pas nécessairement réalisée par un Observatoire, mais qu’elle est parfois réalisée sous forme d’enquête, de baromètre numérique remis à jour chaque année au sein d’une administration ou d’une université. On dénombre 12 initiatives régionales de mesure des usages numériques en France.
Des maîtres d’ouvrages variés, des motivations communes
Les baromètres ou enquêtes sur les usages numériques sont portées par différents types d’acteurs. Il s’agit principalement des Conseils régionaux (Corse, PACA, Auvergne, Rhône-Alpes, Lorraine, Franche-Comté, Bourgogne, Poitou-Charentes, Pays de la Loire), mais aussi des acteurs parapublics (Agence Aquitaine du Numérique AEC, CCI Alsace), et académiques (GIS M@rsouin-Télécom Bretagne, Ensai et Sciences-Po Rennes). Les financements viennent des Conseils Régionaux, mais aussi souvent de l’Etat (dans le cadre des Contrat-Plan-Etat-Région) et de l’Union Européenne (Fonds FEDER).Les Observatoires régionaux des usages numériques sont-ils compatibles et comparables ?
La mesure et la comparaison des de l’évolution des usages numériques a été très tôt une préoccupation dans l’élaboration des enquêtes régionales. 11 des 12 initiatives d’enquêtes régionales ont en effet adopté des indicateurs identiques et une méthodologie comparable. Cette initiative concertée est née du projet [SOURIR], créé à l’initiative de l’Aquitaine, la Wallonie et la Bretagne en 2000. Celui-ci a proposé de définir une méthodologie commune pour la mesure d’indicateurs régionaux de l’usage et de la diffusion des TIC. Il a également favorisé la mise en place d’un réseau pour la mutualisation du travail et des retours d’expérience pour l’élaboration d’indicateurs, de questionnaires et la mise en œuvre de méthodologie compatibles et pour comparer les résultats des régions entre eux.11 des 12 initiatives d’enquêtes régionales ont adopté des indicateurs identiques et une méthodologie comparable.Un socle d’indicateurs communs est ainsi proposé pour mesurer les usages numériques des ménages. Toutefois, des focus spécifiques sont réalisés selon les années et les Régions pour identifier des tendances : usages des jeunes, usages des séniors, usages du smartphone,… La non-reproduction de ces enquêtes d’une édition sur l’autre et leur champ étant en dehors de celui des indicateurs de [SOURIR] ne permet pas d’en faire des mesures comparables dans le temps ou dans l’espace.
Enfin les enquêtes n’ont pas été publiées à la même fréquence selon les Régions (annuellement pour Rhônes-Alpes, tous les 2 ou 3 ans pour les autres), et certaines Régions ont abandonné l’édition de leur baromètre. Ainsi sur les 12 enquêtes réalisées, il est difficile de proposer une réelle analyse de l’évolution des usages dans le temps ou encore d’offrir une approche comparée des régions françaises entre elles. Mais si elles ne sont pas systématiques et ne s’appliquent qu’à quelques, les comparaisons inter-régions apparaissent dans la plupart des rapports issus des enquêtes.
Valorisation des données et des informations recueillies
Les baromètres sont souvent utilisés comme des outils d’aides à la décision. Financés dans le cadre du Contrat-Plan-Etat-Région, les baromètres régionaux ont permis d’orienter et alimenter ce dispositif.C’est d’ailleurs cette fonction, plus que celle d’un observatoire produisant des données qui a motivé la création des baromètres régionaux, à l’exception du GIR M@rsouin. Ce dernier est en effet le seul acteur académique à porter un observatoire des usages numériques.
Il faut néanmoins souligner que les données issues des enquêtes régionales sur les usages numériques sont disponibles en open data pour 7 des 12 enquêtes. Cette mise à disposition des données témoigne de la volonté des collectivités de créer de la transparence et de l’utilité publique à travers ces enquêtes, dépassant la simple fonction d’aide à la décision.
Quel est l’avenir des baromètres numériques régionaux ?
Les enquêtes sur les usages numériques devraient être renouvelées dans les Régions Alsace-Lorraine-Champagne-Ardennes, Aquitaine, Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, et Bretagne, dès cette année pour certaines.Si la mise à jour des indicateurs de la méthodologie [SOURIR] pose question, c’est encore le souci de continuité du baromètre d’année en année qui reste un enjeu pour les collectivités.
Quant à la possibilité d’adopter une méthodologie évolutive, capable de suivre les changements de la société numérique tout en préservant la continuité des indicateurs, les travaux du D21 en Allemagne, de l’Oxford Survey ou de M@rsouin (voir nos autres articles) peuvent faire référence pour poursuivre une initiative coordonnée des Régions dans l’esprit du réseau [SOURIR].